Dans l’objectif de préserver la santé et la sécurité de leurs salariés et de respecter leur obligation de prévention des risques, des employeurs ont mis en place des prises de température frontale à l’entrée de leurs sites, quand certains n’ont pas demandé aux salariés d’effectuer eux-mêmes des relevés journaliers de leur température.
Les employeurs ne peuvent toutefois prendre des mesures qui porteraient atteinte de façon disproportionnée à la vie privée des salariés.
La CNIL a rappelé récemment que « lorsqu’elle fait l’objet d’un traitement, la température corporelle d’un individu constitue une donnée sensible relative à sa santé, justifiant qu’elle fasse l’objet d’une protection particulière ».
Le Ministère du travail a publié un protocole national de déconfinement complétant des fiches conseils et des guides métiers déjà présents.
Ce protocole prévoit les mesures barrières et de distanciation physique désormais connues de tous, l’utilisation de masques…
Il déconseille le contrôle de température à l’entrée des établissements et structures et ce d’autant que l’infection COVID-19 peut être asymptomatique et que la fièvre n’est pas toujours présente chez les malades.
Toutefois, le Ministère du travail n’exclut pas totalement la possibilité pour les entreprises d’organiser un contrôle de la température des personnes entrant sur leur site : ces mesures peuvent faire l’objet de la procédure relative à l’élaboration des notes de service valant adjonction au règlement intérieur prévu à l’article L 1321-5 du Code du Travail.
Le protocole rappelle que ces mesures doivent respecter les dispositions du Code du Travail et celles relatives au règlement intérieur.
Ainsi, elles doivent être proportionnées à l’objectif recherché, offrir toutes les garanties requises quant au respect de la dignité du salarié, faire l’objet d’une information préalable et préciser les conséquences attachées au refus du salarié.
L’employeur doit certes assurer l’effectivité de son obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des salariés ; pour autant, il ne peut imposer à l’entrée du site de prise de température, le salarié pouvant refuser ce contrôle.
L’article L1121-1 du Code du Travail rappelle que « nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche et non proportionnées au but recherché ».
La CNIL rappelle que la seule vérification de la température au moyen d’un thermomètre sans qu’aucune trace ne soit conservée, ne relève pas de la règlementation en matière de protection des données.
Elle interdit la mise en place des outils de captation automatique de la température et précise que l’employeur ne peut constituer un fichier conservant des données de température.
Un parallèle peut être établi, avec les dépistages en manière d’alcoolémie via un alcootest dont l’objectif étant de protéger le salarié concerné mais également les autres salariés de l’entreprise de risques d’accidents au regard de la tâche confiée au salarié et de la nature de l’activité.
Ces contrôles sont strictement encadrés et supposent notamment :
Une clause du règlement intérieur ou une note de service pour les entreprises qui n’y sont pas soumises au regard de leur effectif ;
Des conditions de travail qui le justifient ;
Des conditions qui garantissent les droits des salariés.
Les modalités de ce contrôle doivent pouvoir être contestées par le salarié.
En l’occurrence la légitimité du contrôle d’accès au site via un relevé de température frontale est contestable : sa pertinence et son efficacité au regard de la prévention du risque de contamination est discutable et cette mesure n’apparaît pas proportionnée au but recherché.