Source : Conseil d’État 13/09/2021 n°451564 mentionné dans les tables du recueil Lebon
Il est courant que conférer un effet rétroactif fiscal à une opération de fusion de façon que la société absorbante soit considérée comme ayant réalisé les opérations de la société absorbante et de supporter en ses lieu et place les conséquences fiscales.
La fusion prend ainsi effet d’un point de vue juridique à la date de la dernière assemblée approuvant l’opération de fusion mais d’un point de vue fiscal, l’opération prend effet à une date antérieure que les parties détermineront.
Cette « fiction » fiscale est cependant encadrée par la loi fiscale que vient préciser le Conseil d’État dans l’arrêt commenté.
Le Conseil d’État rappelle tout d’abord au visa de l’article 38 du CGI que « qu’un bilan doit être établi à la date de clôture de chaque période et que ce bilan doit exprimer de manière régulière et sincère la situation de l’entreprise, telle qu’elle résulte à cette date des opérations de toute nature faites par l’entreprise. Si parmi ces opérations figurent des contrats conclus avec des tiers dans le cadre d’une gestion commerciale normale, les conséquences de ces contrats pour l’entreprise, qu’il s’agisse des droits et des obligations résultant de leurs stipulations ou des profits et des charges entraînés par leur exécution, doivent donc être reprises dans le bilan établi à la date de clôture de la période au cours de laquelle les contrats ont été conclus. Par suite, lorsqu’un effet rétroactif est attaché à ces contrats par la volonté des parties ou par la loi civile ou commerciale, les conséquences de cette rétroactivité doivent affecter les résultats de l’exercice au cours de laquelle de pareils contrats ont été effectivement conclus ».
En d’autres termes, la rétroactivité ne peut remonter au-delà du premier jour d’ouverture de l’exercice au cours duquel est intervenue l’opération.
Ainsi, si les parties à la fusion ont un exercice comptable débutant le 1er janvier et se terminant le 31 décembre suivant, une fusion intervenant au cours de l’exercice N ne pourra rétroagir au-delà du 1er janvier N.
Le Conseil d’État précise que « les effets de la fusion, qui ne saurait exercer une influence sur le bilan de clôture du ou des exercices précédents de chacune des deux sociétés concernées, et donc sur les bénéfices imposables dégagés par celles-ci au cours de ces exercices, ne sauraient remonter à une date antérieure à la plus récente des dates d’ouverture des exercices des deux sociétés au cours desquels la convention a définitivement été conclue ».
Ainsi, si une des parties à la fusion ouvre son exercice au 1er janvier tandis que l’autre ouvre son exercice le 1er février pour une fusion constatée le 30 novembre N suivant, l’effet rétroactif ne pourrait remonter au-delà du 1er février afin d’éviter que l’opération intervenue n’exerce une influence sur les comptes clos au 30 janvier N.