Source : Cass. com., 28 février 2018, n°16-18.692, F-P+B+I
I – Les faits
Une banque a conclu avec une société une convention de compte courant et lui a consenti une ouverture de crédit, ainsi qu’une ligne d’escompte. Un cogérant de la société s’est rendu caution solidaire de l’ensemble des engagements de la société, à hauteur de la somme de 74.100 €, et pour une durée de 10 ans.
Cette société a par la suite absorbé deux sociétés : l’une bénéficiait de trois crédits et l’autre de deux crédits, tous consentis par la même banque antérieurement à l’absorption. La banque s’est alors prévalue de l’exigibilité anticipée de ces crédits en raison de la dissolution des deux sociétés absorbées, et a clôturé le compte de la société absorbante, laquelle a, ensuite été mise en liquidation judiciaire.
La banque ayant assigné le cogérant caution en paiement, celui-ci a recherché responsabilité de l’établissement de crédit pour manquement à son devoir de mise en garde et, contestant être tenu de garantir les concours accordés à d’autres sociétés avant leur absorption par la société débitrice, a demandé que son obligation soit limitée au montant du découvert bancaire. La cour d’appel (CA Paris, Pôle 5, 6ème ch., 18 mars 2016, n°14/21560) ayant condamné la caution à payer, cette dernière a formé un pourvoi en cassation.
II – L’arrêt de rejet
D’une part, la Cour régulatrice approuve l’arrêt d’appel en ce qu’il a condamné la caution à payer la somme de 74.100 €. Après avoir relevé que le cogérant s’était rendu caution de l’ensemble des engagements, présents ou futurs, de la société absorbante à l’égard de la banque dans la limite de 74.100 € et pour une durée de dix ans, l’arrêt retient exactement qu’il est mal fondé à contester être tenu des créances de la banque sur la société absorbante résultant des crédits octroyés aux deux sociétés qu’elle a absorbées, et dont la dissolution sans liquidation a entraîné la transmission universelle de leur patrimoine à la société absorbante.
D’autre part, elle approuve également l’arrêt d’appel en ce qu’il a retenu que la banque n’avait commis aucun manquement au titre de son obligation de mise en garde et d’information en n’informant pas la caution des conséquences pour elle de la transmission universelle de patrimoine résultant des opérations d’absorption.
Le pourvoi est par conséquent rejeté.
III – L’étendu des cautionnements garantissant les créances de la société absorbante
La Cour de cassation applique par cet arrêt la théorie distinguant l’obligation de couverture de l’obligation de règlement, pour délimiter l’engagement subsistant de la caution après une opération de fusion.
La Chambre commerciale étend cette solution à la situation résultant de la dissolution sans liquidation d’une société unipersonnelle[1]. Il peut s’agit aussi du cas de dissolution par voie de fusion de la société cautionnée[2]. Elle rappelle également que peu importe, à cet égard, que la dette de remboursement n’ait pas été exigible à la date de la fusion, dès lors que la caution s’était engagée pour le remboursement d’un prêt, constitutif d’une obligation à terme[3].
Thomas LAILLER
Vivaldi-Avocats
[1] Cass. com., 19 nov. 2002, n°00-13.662, publié au Bulletin
[2] Cass. com., 25 mars 1997, n°95-12.018, inédit
[3] Cass. com., 17 juillet 2001, n°98-15.736, publié au bulletin