Exclusion d’un associé de SAS : à quelle date se placer pour apprécier la valeur de rachat des titres ?

Christine MARTIN
Christine MARTIN - Avocat associée

 

SOURCE : Cass. com., 16 septembre 2014, Arrêt n° 760 FS-P+B (n° 13.17.807).

 

Un associé de SAS a été exclu de la société par une décision du 11 juillet 2008.

 

Par suite, et conformément à l’article 15 des statuts sociaux, il devait céder la totalité de ses actions, dans un délai de 60 jours à compter de son exclusion, aux autres actionnaires, le prix des actions étant fixé d’un commun accord et, à défaut, dans les conditions prévues à l’article 1643-4 du Code Civil, soit à dire d’expert.

 

Les parties étant en désaccord sur le montant du rachat de ces parts sociales, un expert a été saisi de cette mission par application de l’article 1843-4 susvisé.

 

Dans son rapport du 15 janvier 2010, l’expert chiffrait la valeur des 600 parts détenues par l’associé exclu à la somme de 101 892 € au jour de l’exclusion et à 39 600 € au jour de la cession future.

 

Par suite, l’associé exclu faisait assigner ses coassociés afin de voir fixer la valeur de rachat de ses parts au jour de son exclusion, soit à la somme de 101 892 €.

 

Débouté par un Jugement de première instance du 08 juin 2011, ayant retenu que la valeur des droits sociaux devait être estimée à la date la plus proche de celle du remboursement de la valeur de ses droits, l’associé exclu avait interjeté appel de cette décision.

 

Il fut tout aussi malchanceux devant les seconds Juges puisque la Cour d’Appel d’AIX EN PROVENCE, dans un Arrêt du 21 mars 2013, va confirmer le Jugement en toutes ses dispositions, considérant que si les 600 actions de l’associé exclu étaient “gelées” depuis le 11 septembre 2008 et qu’il n’avait plus de droit de vote, il n’en demeurait pas moins que la perte de sa qualité d’actionnaire était intervenue au jour du remboursement de la valeur de ses droits sociaux, et que la valeur desdits droits devait être ainsi déterminée à la date la plus proche de celle du remboursement de leur valeur.

 

Ensuite de cette nouvelle décision défavorable, l’associé évincé se pourvoit en Cassation.

 

A l’appui de son pourvoi, il soulève :

 

       Que lorsque l’associé exclu perd l’exercice de ses droits d’associé avant le remboursement de ses droits sociaux, c’est à la date de cette perte que l’évaluation de ses droits doit intervenir. Or, il considère qu’en retenant la date la plus proche de celle du remboursement de la valeur de ses droits, alors que ses actions étaient “gelées” depuis le jour de son exclusion de la société et qu’il n’avait plus le droit de vote depuis cette date, la Cour d’Appel aurait violé les articles L.227-16 du Code de Commerce et 1843-4 du Code Civil.

 

       Que la décision de l’expert, en cas de désaccord des parties sur le prix des actions, s’impose à elles et il n’appartient pas au Juge d’imposer aux parties une convention différente de celle qu’elles avaient entendu établir. Qu’en ayant retenu la somme de 39 600 € après avoir constaté qu’elle ne correspondait qu’à une hypothèse d’évaluation demandée par les associés, la Cour d’Appel aurait encore violé l’article 1843-4 du Code Civil.

 

Toutefois, la Haute Cour ne va pas retenir les griefs de l’associé exclu.

 

Relevant tout d’abord, d’une part, que la suspension de l’exercice des droits non pécuniaires de l’associé tenu de céder ses actions, tant qu’il n’a pas procédé à cette cession, était sans incidence sur sa qualité d’associé, et relevant, d’autre part, que les statuts de la société ne précisaient pas la date à laquelle la valeur des titres de l’associé exclu devait être déterminée et constatait que le tiers estimateur avait fixé à 39 600 € la valeur des actions de l’associé exclu à “la date la plus proche de la cession future”, la Cour d’Appel a fait l’exacte application des dispositions de l’article 1843-4 du Code Civil en retenant cette somme.

 

Par suite, la Haute Cour rejette le pourvoi.

 

Christine MARTIN

Associée

Vivaldi-Avocats

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