Les suppléments d’impôt mis à la charge des contribuables peuvent être contestés par voie de réclamation en vertu de l’article L190 du LPF.
L’article R 196-1 du LPF précise le délai dans lequel doit intervenir une réclamation pour être recevable.
Elle doit être présentée « à l’administration au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle, selon le cas :
a) De la mise en recouvrement du rôle ou de la notification d’un avis de mise en recouvrement ;
b) Du versement de l’impôt contesté lorsque cet impôt n’a pas donné lieu à l’établissement d’un rôle ou à la notification d’un avis de mise en recouvrement ;
c) De la réalisation de l’événement qui motive la réclamation. Ne constitue pas un tel événement une décision juridictionnelle ou un avis mentionné aux troisième et cinquième alinéas de l’article L. 190 ».
L’article L190 définit la notion de décision juridictionnelle : « sont considérés comme décisions juridictionnelles ou des avis rendus au contentieux les décisions du Conseil d’Etat ainsi que les avis rendus en application de l’article L. 113-1 du code de justice administrative, les arrêts de la Cour de cassation ainsi que les avis rendus en application de l’article L. 441-1 du code de l’organisation judiciaire (2), les arrêts du Tribunal des conflits et les arrêts de la Cour de justice de l’Union européenne se prononçant sur un recours en annulation, sur une action en manquement ou sur une question préjudicielle ».
Dans la mesure où cette liste ne comprend pas les décisions du Conseil Constitutionnel, des juridictions administratives ont interrogé le Conseil d’Etat sur la question de savoir si une telle décision pouvait être considérée comme un évènement susceptible de faire courir le délai de réclamation.
Le Conseil d’Etat se prononce dans deux avis, l’un concernant les décisions du Conseil Constitutionnel constatant la non-conformité à la Constitution d’une disposition législative rendues suites à une Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC) et l’autre concernant les décisions du Conseil Constitutionnel émettant une réserve d’interprétation pour la conformité d’une disposition législative.
Dans les deux cas, après avoir constaté que ces décisions ne sont pas expressément visés par l’article L190 du LPF, le Conseil d’Etat juge que « toutefois, seuls doivent être regardés comme constituant le point de départ de ce délai les événements qui ont une incidence directe sur le principe même de l’imposition, son régime ou son mode de calcul. Une décision par laquelle le Conseil constitutionnel, statuant sur le fondement de l’article 61-1 de la Constitution, déclare inconstitutionnelle une disposition législative ou ne la déclare conforme à la Constitution que sous une réserve d’interprétation ne constitue pas en elle-même un tel événement susceptible d’ouvrir un nouveau délai de réclamation ».
Néanmoins, le Conseil d’Etat ne ferme pas totalement la porte puisqu’il précise qu’il appartient au Conseil Constitutionnel, statuant sur la constitutionnalité d’une disposition, « de prévoir si, et le cas échéant dans quelles conditions, les effets que la disposition a produits avant l’intervention de cette déclaration sont remis en cause, au regard des règles, notamment de recevabilité, applicables à la date de sa décision ».
Dans le cas où le Conseil Constitutionnel précise dans sa décision que la déclaration d’inconstitutionnalité est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement, le Conseil d’Etat en déduit que cette déclaration d’inconstitutionnalité peut être invoquée dans toutes les procédures contentieuses en cours, quelle que soit la période d’imposition sur laquelle porte le litige.
Une telle déclaration peut donc aussi être utilisée pour motiver une réclamation qui est, le Conseil d’Etat prend soin de le préciser, « encore susceptible d’être formée eu égard aux délais fixés par les articles R. 196-1 et R. 196-2 du livre des procédures fiscales ».