Demande de déréférencement auprès de Google : un préalable obligatoire à toute action en référé

Virginie PERDRIEUX
Virginie PERDRIEUX

 

SOURCE : Tribunal de Grande Instance de Paris, ordonnance de référé du 10 février 2017, Monsieur X. / Google France et Google Inc.

 

Monsieur X., médecin, a été condamné à une peine de quatre ans d’emprisonnement et à 20.000 euros d’amende par le Tribunal correctionnel de Grasse pour des faits d’escroquerie à l’assurance maladie, avec interdiction définitive d’exercer la médecine.

 

Ces faits ont été relayés dans plusieurs articles de Presse diffusés sur Internet. Un article de Nice Matin du 25 décembre 2015 indique notamment que « Monsieur X., 59 ans » a été condamné à 4 ans de prison, le médecin étant « coupable d’avoir, entre 2012 et 2014, facturé des centaines de consultations fictives ou abusives à la Sécurité sociale ».

 

La Cour d’appel d’Aix en Provence a ensuite ramené sa peine à deux ans d’emprisonnement, dont une avec sursis et une interdiction définitive d’exercer la médecine uniquement à titre libéral. Cet arrêt a fait l’objet d’un pourvoi en cassation actuellement pendant.

 

Monsieur X. a saisi le site Google d’une demande de déréférencement de trois URL correspondant aux sites relatant sa condamnation en première instance, demande rejetée par Google.

 

Il a donc saisi le Juge des référés pour solliciter, au-delà de sa demande de déréférencement des trois URL, la suppression ou à défaut la désindexation d’images accessibles par le biais de Google Images, visant sept URL.

 

Le Juge des référés a tout d’abord rappelé que la société Google était simplement gestionnaire d’un moteur de recherche, mais pas l’éditeur des sites Internet querellés, de sorte qu’elle ne pouvait être condamnée à supprimer les contenus jugés illicites, mais simplement à procéder à une désindexation de ceux-ci par rapport aux nom et prénom du requérant.

 

Concernant les trois premiers URL, le Juge des référés considère qu’il n’existe pas de motif légitime pour empêcher l’accès aux informations relatives à la condamnation de Monsieur X. en première instance, puisqu’un tel référencement renvoie à une information exacte, sur un sujet d’actualité récent relatif à une fraude à l’assurance maladie, ce qui participe du droit à l’information du public sur une affaire pénale, induisant l’identité de la personne mise en cause dans le cadre d’un procès public.

 

Le Juge des référés a ainsi opéré une balance entre le droit du public à l’information et le droit de tout individu au respect de sa vie privée. L’ancienneté de la condamnation s’avère être un élément déterminant pour savoir si le traitement des données est devenu inadéquate ou non pertinent. En l’espèce, l’ancienneté d’un an de la condamnation n’apparaît pas suffisante pour rendre l’information obsolète.

 

Concernant les sept URL, le Juge des référés rejette la demande de désindexation, sans même se prononcer sur le caractère licite ou non du contenu, considérant qu’une demande préalable de déréférencement auprès de la société Google constituait un prérequis indispensable à l’action en référé. Or, en l’espèce, Monsieur X. n’avait pas fait de demande pour ces sept URL auprès de Google.

 

Selon le Juge, « il s’en déduit que Monsieur X. ne justifie pas d’un trouble manifestement illicite lui permettant d’agir en référé, puisqu’il ne démontre pas que la société Google Inc. aurait, malgré une demande sur ce point, refusé de déréférencer des liens de manière à l’évidence illicite ».

 

La demande préalable auprès de Google semble ainsi apparaître comme une condition de recevabilité de l’action.

 

Un tel prérequis vise à diminuer le nombre de contentieux judiciaires, en incitant les parties à rechercher un règlement amiable de leur litige, à la manière des modes alternatifs de règlement des conflits ou des litiges, en constante évolution depuis 2015.

 

 Virginie PERDRIEUX

Vivaldi-Avocats

 

 

 

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