(bis repetita)
Source : Cass.3ème Civ., 25 mai 2022, n°21-11.314
C’est ce que rappelle la Troisième Chambre Civile de la Cour de Cassation, dans cette décision inédite, comme suit :
« …
Faits et procédure
1. Selon l’arrêt attaqué (Besançon, 8 décembre 2020), M. [P] a conclu un contrat de construction de maison individuelle avec la société Maisons Patrick Barbier, dénommée depuis AFC, puis AIFB, aux droits de laquelle se trouve la Société française de maisons individuelles (la SFMI).
2. Invoquant l’irrégularité du contrat et l’obligation pour la société AFC de lui régler le coût des travaux restés à sa charge, M. [P] l’a assignée en paiement de diverses sommes.
Examen des moyens
(…)
Mais sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
8. La SFMI fait grief à l’arrêt de la condamner à payer à M. [P] la somme de 39 826,14 euros, après compensation de sa propre créance, alors « que la société SFMI faisait valoir dans ses conclusions que la facture de 14 052,34 euros dont M. [P] exigeait le paiement correspondait pour l’essentiel, non aux frais d’élargissement du chemin d’accès, à les supposer exigés par le règlement d’urbanisme, mais au goudronnage de son propre tènement, qui n’était nullement nécessaire à l’utilisation de l’immeuble ; qu’en condamnant la société SFMI au paiement de cette somme « pour l’élargissement de la voirie » sans répondre à ces conclusions, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 231-2 et R. 231-4 du code de la construction et de l’habitation, dans leur version applicable à la cause :
9. Selon le premier de ces textes, le contrat de construction individuelle doit indiquer le coût du bâtiment à construire, égal à la somme du prix convenu et, s’il y a lieu, du coût des travaux dont le maître de l’ouvrage se réserve l’exécution, en précisant, d’une part, le prix convenu et, d’autre part, le coût des travaux dont le maître de l’ouvrage se réserve l’exécution, ceux-ci étant décrits et chiffrés par le constructeur et faisant l’objet, de la part du maître de l’ouvrage, d’une clause manuscrite spécifique et paraphée par laquelle il en accepte le coût et la charge.
10. Selon le second, une notice descriptive est annexée au contrat et indique les caractéristiques de l’immeuble et des travaux d’équipement intérieur et extérieur qui sont indispensables à l’implantation et à l’utilisation de celui-ci, en faisant la distinction entre ces éléments, selon que ceux-ci sont ou non compris dans le prix convenu. Elle indique le coût de ceux desdits éléments dont le coût n’est pas compris dans le prix. Elle doit porter, de la main du maître de l’ouvrage, une mention signée par laquelle celui-ci précise et accepte le coût des travaux à sa charge qui ne sont pas compris dans le prix convenu.
11. Pour condamner la SFMI au paiement de la somme de 39 826,14 euros, l’arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que la notice descriptive soumise à M. [P] fait état de travaux restant à sa charge, que seul le coût des travaux de terrassement est chiffré mais qu’il est largement sous-estimé, que les autres travaux non compris dans le prix ne font l’objet d’aucune évaluation, que ni la notice descriptive ni les conditions particulières du contrat ne portent la mention manuscrite du montant des travaux restant à la charge du maître de l’ouvrage et que le coût de ces travaux doit être supporté par le constructeur.
12. En statuant ainsi, alors que seule la sanction de la nullité du contrat est applicable à l’irrégularité résultant de l’absence de clause manuscrite par laquelle le maître de l’ouvrage précise et accepte les travaux à sa charge qui ne sont pas compris dans le prix convenu, la cour d’appel a violé les textes susvisés.
Et sur le moyen du pourvoi incident
Enoncé du moyen
13. M. [P] fait grief à l’arrêt de le condamner à payer à la SFMI des intérêts mensuels de retard de 1 % sur la somme de 28 093,52 euros à compter du 15 avril 2015, alors « que le contrat de construction d’une maison individuelle peut prévoir à la charge du maître de l’ouvrage une pénalité pour retard de paiement, à un taux qui ne peut excéder 1 % par mois sur les sommes non réglées ; que seule la levée de l’intégralité des réserves relevées lors de la réception rend exigible le solde dû par le maître de l’ouvrage et fait courir l’intérêt de retard stipulé dans le contrat de construction ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a condamné M. [P] à payer à la société SFMI l’intérêt contractuel de retard de 1 % à compter du 15 avril 2015, «date à laquelle le solde est devenu exigible en raison du défaut de consignation qui aurait dû intervenir au plus tard le jour même de la réception des travaux en raison de l’existence de réserves» ; qu’en se prononçant ainsi, tandis que le défaut de consignation du solde dû au constructeur n’était pas de nature à rendre exigible ce solde, les réserves n’ayant pas été intégralement levées, la cour d’appel a violé les articles R. 231-7 et R. 231-14 du code de la construction et de l’habitation. »
Réponse de la Cour
Vu les articles R. 231-7 et R. 231-14 du code de la construction et de l’habitation, dans leur version applicable à la cause :
14. Selon le premier de ces textes, lorsque le maître de l’ouvrage ne se fait pas assister par un professionnel pour la réception, le solde du prix est payable dans les huit jours qui suivent la remise des clés à la réception, si aucune réserve n’a été formulée, ou, dans le cas contraire, à la levée des réserves.
15. Selon le second, le contrat de construction peut prévoir à la charge du maître de l’ouvrage une pénalité pour retard de paiement dont le taux correspond à un pourcentage des sommes non réglées.
16. Pour condamner M. [P] au paiement des intérêts mensuels de retard de 1 % sur le solde du prix, l’arrêt retient, après avoir relevé que des réserves avaient été formulées et que M. [P] restait débiteur d’une partie du prix qui n’avait pas été consignée, que le maître de l’ouvrage doit être condamné à payer au constructeur des intérêts mensuels de retard sur le solde du prix à compter de la date de la réception, en l’absence de consignation de la somme due à cette date.
17. En statuant ainsi, alors que le solde du prix n’est exigible qu’à la levée des réserves, la cour d’appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il condamne la Société française de maisons individuelles à payer à M. [P], après compensation, la somme de 39 826,14 euros, outre intérêts au taux légal, et M. [P] à payer à la Société française de maisons individuelles des intérêts mensuels de retard de 1 % sur la somme de 28 093,52 euros à compter du 15 avril 2015, l’arrêt rendu le 8 décembre 2020, entre les parties, par la cour d’appel de Besançon ;… »