Source : Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 17 mars 2021, 19-10.414
Le parasitisme se définit classiquement comme le fait de tirer indûment profit du savoir-faire et des efforts humains et financiers consentis par une entreprise concurrente, « sans bourse délier ». (Cour de cassation, Chambre commerciale, 5 juillet 2016, pourvoi n°14-10.108).
Celui-ci relève du droit commun de la responsabilité civile délictuelle, sa qualification imposant la démonstration d’une faute, d’un préjudice et d’un lien de causalité.
L’intérêt de l’arrêt de la Cour de cassation vise précisément la question de l’existence ou non d’un préjudice.
En l’espèce, la présentation des produits d’une société ayant pour activité la vente en ligne de saunas et de spas était accompagnée d’un descriptif technique assorti d’un article intitulé « l’avis du spécialiste », mettant en valeur leurs qualités et spécificités.
Reprochant à un concurrent de se livrer à une copie de ces descriptifs techniques et articles, elle a assigné ce concurrent en paiement de dommages et intérêts sur le fondement de la concurrence déloyale, visant précisément des actes de parasitisme.
La Cour d’appel de Versailles avait débouté la demanderesse en affirmant qu’aucun acte de concurrence déloyale par copie servile n’était caractérisé.
La Cour énonçait que tout préjudice en matière de concurrence déloyale devait se caractériser par une perte de clientèle ou par une perte de chiffre d’affaires imputable aux actes de parasitisme.
Elle relevait que l’existence d’un lien de causalité entre l’attitude parasitaire imputée à la société concurrente et le préjudice corrélatif revendiqué n’était pas démontré.
La Cour retenait également que l’auteur des prétendus actes de parasitisme avait procédé au retrait des références litigieuses à réception de la mise en demeure qui lui avait été adressée et que l’utilisation sur une courte période des descriptifs objet du litige n’avait pu porter préjudice, accueillant l’argument de la société concurrente suivant lequel elle n’aurait réalisé aucune vente depuis la mise en ligne du site, la conduisant à exclure l’existence d’un préjudice fondé sur des allégation d’atteinte à l’image, d’un trouble commercial ou d’un préjudice moral.
La société demanderesse formant un pourvoi, elle expose devant la Haute Juridiction que :
Les actes de dénigrement constitutifs de concurrence déloyale constitue un trouble commercial générant un préjudice, même moral ;
Même en l’absence d’une perte ou d’un détournement de clientèle, l’existence d’un acte de concurrence déloyale ouvre droit à la réparation des préjudices constitués par les atteintes à des éléments attractifs de clientèle ou à la capacité de concurrence de la victime.
Dans son arrêt du 17 mars 2021, la Cour de cassation prend le contrepied de la décision querellée en énonçant que « le parasitisme économique consistant à s’immiscer dans le sillage d’autrui afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire, il s’infère nécessairement un préjudice, fût-il seulement moral, de tels actes, même limités dans le temps ».
Cet arrêt constitue le rappel d’un principe et non une nouveauté, la Cour de cassation ayant fermement établi sa jurisprudence ouvrant la voie à la réparation du seul préjudice en dehors de tout autre préjudice (Cass., com., 1er juillet 2003, pourvoi n°01-13.052) : « Il s’infère nécessairement d’un acte de concurrence déloyale un trouble commercial constitutif d’un préjudice, fût-il seulement moral ».