Bail commercial, clause d’indexation « uniquement à la hausse », divisibilité, portée de la sanction du réputé non écrit.

Alexandre BOULICAUT
Alexandre BOULICAUT - Juriste

Dans le droit fil de l’arrêt publié du 12 janvier 2022, commenté par Chronos[1], la troisième chambre civile rappelle qu’il appartient aux juridictions du fond saisies d’une demande en réputé non écrit d’une clause d’indexation « uniquement à la hausse », de caractériser la divisibilité ou l’indivisibilité de la clause litigieuse, la référence à la « condition essentielle et déterminante » selon laquelle le bailleur n’aurait pas contracté étant insuffisante à justifier l’indivisibilité.

SOURCE : Cass. civ 3ème, 23 novembre 2022, n°21-18921, Inédit

Nouvelle illustration jurisprudentielle de la portée de la sanction attachée à une clause d’indexation « uniquement à la hausse », stipulée comme « une condition essentielle et déterminante » de l’engagement des parties au contrat de bail, et nouvel échec pour le locataire commercial dans sa quête de condamnation du bailleur au paiement d’une certaine somme au titre des loyers trop versés.

Les faits de l’espèce sont désormais parfaitement connus : intégrée quasiment comme une clause d’usage par les rédacteurs de baux commerciaux, un bail commercial stipulait une clause d’indexation annuelle du loyer, laquelle n’avait vocation qu’à s’appliquer qu’en cas de variation à la hausse de l’indice de révision.

En cours d’exécution du bail, le locataire se prévaut de l’irrégularité de la clause d’indexation et assigne son bailleur en paiement d’une certaine somme au titre des loyers trop versés.

Le bailleur fait grief à l’arrêt de Cour d’appel de réputer non écrite la clause d’indexation litigieuse dans son entier, alors que seule la stipulation prohibée doit être réputée non écrite. Pour les juges d’appel, le bail stipulait la clause d’indexation comme une condition essentielle et déterminante de leur engagement, suffisant pour caractériser l’indivisibilité de la clause.

Censure des juges du Quai de l’Horloge au dispositif ainsi repris :

« Vu l’article 1217 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :

Aux termes de ce texte, l’obligation est divisible ou indivisible selon qu’elle a pour objet ou une chose qui dans sa livraison, ou un fait qui dans l’exécution, est ou n’est pas susceptible de division, soit matérielle, soit intellectuelle.

Pour réputer non écrite en son entier la clause d’indexation, l’arrêt retient que les parties ayant, dans le bail convenu et signé entre elles, présenté ladite clause comme une condition essentielle et déterminante, celle-ci doit être réputée non écrite en son entier sans qu’il n’y ait lieu de distinguer entre le principe de l’indexation et ses modalités.

En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser l’indivisibilité, alors que seule la stipulation prohibée doit être réputée non écrite, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision.

Portée et conséquences de la cassation

La cassation du chef du dispositif ayant réputé non écrite en son entier la clause d’indexation, entraîne, par voie de conséquence, l’annulation de celui condamnant les bailleurs à restituer à la locataire une certaine somme au titre du trop-perçu de loyers (…).

(…).

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il dit non écrite la clause d’indexation contenue dans le bail (…) ».

En synthèse :

  • Seule la stipulation qui crée la distorsion prohibée doit être réputée non écrite, et non la clause entière ;
  • La stipulation selon laquelle la clause d’indexation du loyer constitue une condition essentielle et déterminante selon laquelle le bailleur n’aurait pas contracté, ne saurait justifier l’indivisibilité de la clause.

[1] https://vivaldi-chronos.com/bail-commercial-clause-dindexation-uniquement-a-la-hausse-fin-du-contentieux-dopportunite/

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