Cass. 3e civ., 30 avr. 2025, n° 23-21.574
Lorsqu’un constructeur ne fournit pas de justificatif d’assurance décennale couvrant toutes les activités prévues au contrat, cela peut légitimement entraîner la résiliation de celui-ci par le maître d’ouvrage. Par conséquent, toute demande d’indemnisation par l’entreprise pour résiliation prétendument abusive ou brutale est vouée à l’échec.
En l’espèce, un maître d’ouvrage avait confié des travaux à une entreprise sous la condition expresse qu’elle fournisse une attestation d’assurance de responsabilité décennale. Faute pour l’entreprise de produire cette attestation, le maître d’ouvrage a résilié le contrat. L’entreprise a alors engagé une action en justice pour obtenir des compensations, estimant que la rupture du contrat était abusive.
Cependant, les juges du fond ont rejeté ces prétentions, et leur décision a été confirmée par la Cour de cassation. Celle-ci rappelle que, selon l’article L. 241-1 du Code des assurances, l’obligation pour un constructeur de justifier d’une assurance décennale dès l’ouverture du chantier est une exigence d’ordre public. Le manquement à cette obligation constitue une faute suffisamment grave pour justifier la résolution du contrat, aux torts de l’entreprise.
En l’espèce, aucune attestation n’avait été présentée en août 2020, date d’ouverture du chantier. Des discussions avaient alors été engagées pour régulariser la situation, notamment afin de garantir que l’ensemble des prestations, y compris la maîtrise d’œuvre, soient couvertes par l’assurance décennale. Le 8 septembre, le maître d’ouvrage avait officiellement relancé l’entreprise pour obtenir l’attestation couvrant toutes les activités prévues. En vain : à la date du 22 septembre, aucun document probant n’avait été fourni. La cour d’appel a donc légitimement conclu que l’entreprise était parfaitement consciente que cette carence pouvait entraîner la résiliation du contrat. Dès lors, ses demandes en réparation n’étaient pas recevables.
Il convient de rappeler que tout constructeur au sens de l’article 1792 du Code civil, soumis au régime de responsabilité décennale, doit obligatoirement souscrire une assurance couvrant les éventuels dommages affectant l’ouvrage après sa réception. Cette assurance, visée par l’article L. 241-1 du Code des assurances, doit être effective à la date d’ouverture du chantier.
En validant l’analyse des juges du fond, la Cour de cassation confirme que le maître d’ouvrage peut légitimement résilier le contrat si le constructeur est incapable de prouver cette souscription. Ce défaut constitue un manquement suffisamment grave pour justifier, selon l’article 1224 du Code civil, la résolution du contrat aux torts de l’entreprise.