Appréciation de l’intérêt à agir des associations en droit de l’urbanisme

Harald MIQUET
Harald MIQUET

 

Source : Conseil d’État, 1re et 6e chambres réunies, 20 Octobre 2017 – n° 400585 

 

Par une requête pour excès de pouvoir, l’association de défense de l’environnement et du cadre de vie du quartier ” Epi d’or ” – Saint-Cyr-l’Ecole a demandé au tribunal administratif de Versailles d’annuler, d’une part, l’arrêté du 17 novembre 2015 par lequel le maire de la commune de Saint-Cyr-l’Ecole a accordé à la société civile immobilière (SCI) Marceau un permis de construire relatif à l’édification de trois maisons d’habitation.

 

Le tribunal administratif de Versailles a rejeté par ordonnance la demande d’annulation en considérant les statuts de l’association comme étant « trop général et éloigné des considérations d’urbanisme ».

 

Le Conseil d’Etat saisi en annulation par pourvoi a en revanche fait droit à la demande de l’association requérante en considérant que :

 

« En se fondant sur ce motif alors qu’il ressortait des pièces du dossier qui lui était soumis que le projet autorisé, par sa nature, le nombre de constructions autorisées, le choix d’implantation retenu et la densification qu’il induisait, était susceptible de porter atteinte au cadre de vie des habitants du quartier de l’Epi d’or, dont l’association requérante avait pour objet d’assurer la sauvegarde, le président de la troisième chambre du tribunal a inexactement qualifié les faits de l’espèce »

 

Tout de go, nous dirons que l’intérêt de cette jurisprudence de sous-sections réunies se situe dans l’appréciation de l’intérêt à agir faite par le Conseil d’Etat qui marque une évolution prononcée par rapport à sa jurisprudence antérieure.

 

Le Conseil d’Etat s’est en effet émancipé d’une stricte caractérisation de l’intérêt à agir des associations au regard de leur objet social tel qu’il figure expressément dans leur statuts pour apprécier plus largement l’intérêt à agir en fonction de la nature, le nombre, le choix d’implantation du projet et du cadre de vie des habitants.

 

La discretionalité du juge en sort renforcée en ce que son appréciation de l’intérêt à agir n’est plus bornée en la mise en équation de l’objet social des statuts d’une part et le projet porté par le permis délivrée par l’administration d’autre part.

 

Cette jurisprudence ne remet pas en cause le principe selon lequel le requérant sera tenu de prouver «  l’atteinte qu’il invoque pour justifier d’un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d’affecter directement les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance de son bien »[1]. En revanche, elle pourrait affecter les moyens en défense du défendeur s’il entend contester l’intérêt à agir du requérant, en apporter tout élément de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité.

 

Harald MIQUET

Vivaldi-Avocats


[1] Conseil d’Etat, Section S, 10 Juin 2015 – n° 386121

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