Un cautionnement jugé valable si un tiers rédige la mention manuscrite ?

Jacques-Eric MARTINOT
Jacques-Eric MARTINOT - Avocat

 

Source : Cass. com. 20 septembre 2017 n° 12-18.364 F-D

 

La jurisprudence en matière de cautionnement tend à s’assurer de la bonne information et de la connaissance de la portée de l’engagement.

 

Ainsi, la jurisprudence relative tant à la mention manuscrite que la signature de l’acte de cautionnement est abondante.

 

L’application du Code de la consommation est d’ailleurs claire en ce qu’il précise[1] :

 

« Toute personne physique qui s’engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel fait précéder sa signature de la mention manuscrite suivante et uniquement de celle-ci : ” En me portant caution de X……………….., dans la limite de la somme de……………….. couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de……………….., je m’engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X……………….. n’y satisfait pas lui-même. ” »

 

L’arrêt commenté ce jour vient apporter une inflexion dans la rigueur exigée dans la rédaction de l’acte de cautionnement et plus précisément dans la reproduction de la mention manuscrite.

 

I – Les faits.

 

Par acte sous seing privé, une caution se porte garante d’une société qui sera par la suite mise en liquidation judiciaire.

 

La caution sera par conséquent appelée en réalisation de ses engagements.

 

La Caution sollicitera devant le Tribunal puis devant la Cour d’appel l’annulation de l’acte de cautionnement et la condamnation en paiement en découlant au motif qu’il n’était pas le rédacteur de la mention manuscrite imposée par les textes.

 

Egalement , que la mention manuscrite exigée dans l’acte de cautionnement n’a pas été rédigée de sa main, mais que son assistante est la rédactrice de cette dernière

 

II – L’arrêt de la Cour de cassation.

 

La Cour de cassation saisit du litige rejettera l’argumentation de la Caution au motif que le garant « arrivé en France en 1990 et sachant mal écrire, avait prié sa secrétaire, chargée habituellement de le faire à sa place, de l’accompagner lors de la souscription du cautionnement, qu’il avait signé après qu’elle eut inscrit la mention manuscrite, l’arrêt retient que ces circonstances établissent que la conscience et l’information de la caution sur son engagement étaient autant assurées que si elle avait été capable d’apposer cette mention de sa main, dès lors qu’il avait été procédé à sa rédaction, à sa demande et en sa présence ; qu’ayant ainsi déduit de ces circonstances l’existence d’un mandat régulièrement donné à sa secrétaire par M. X…, c’est à bon droit que la cour d’appel a refusé d’annuler le cautionnement ; que le moyen n’est pas fondé ».

 

Malgré une contradiction évidente avec le texte, la Cour de cassation fait une interprétation large du texte et retient la conscience et l’information de la caution sur l’engagement qu’elle a signé.

 

Attention toutefois, si la caution n’a pas rédigé la mention manuscrite, elle a signé l’acte de cautionnement et la Banque a pu démontrer une connaissance suffisante de la portée des engagements.

 

S’il s’agit en l’espèce d’une appréciation in concreto, cet arrêt vient sonner l’alerte quant à une « mode » dans la contestation des actes de cautionnement.

 

En effet, il n’est pas rare aujourd’hui que les actes de cautionnements soient contestés par les garants qui soulèvent le fait que l’acte est signé de la main d’un autre ou que la mention manuscrite n’a pas été rédigée de leur main.

 

Cependant, les mêmes faits ont reçu une appréciation inverse de la Cour de cassation.[2]

 

La Cour ne s’est donc pas définitivement positionnée !

 

A l’inverse, la Cour s’est déjà prononcée sur l’engagement de caution d’une personne illettrée. Par un arrêt du 9 juillet 2015, la Cour a, pour la protection du garant, exigé que l’acte soit passé sous la forme authentique afin de protéger la caution et de recueillir son consentement éclairé.[3]

 

Par mesure de prudence, l’acte de cautionnement doit être signé en agence, à défaut, la signature doit être à minima vérifiée avec la signature témoin.

 

Jacques-Eric MARTINOT

Vivaldi Avocats.


[1] Article L331-1 du Code de la consommation (ancien L341-2)

[2] Cass. com. 13 février 2012 n° 10-27.814

[3] Cass. 1e civ. 9 juillet 2015 n° 14-21.763 F-PB

 

 

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