ISF : Passif déductible et prêt familial

Eric DELFLY
Eric DELFLY - Avocat associé

Sources :

CE, 25 sept. 2017, n° 412031

Cass. com., QPC, 21 sept. 2017, n° 17-40.049, n° 1330 D

Passif déductible et prêt familial

Certaines ne sont pas déductibles de l’assiette de l’ISF. Il en est ainsi des dettes réputées fictives par l’effet de de l’article 911 du code civil[1] comme le prêt familial consenties par le redevable au profit de ses héritiers présomptifs ou de personnes interposées.

Le code général des impôts, par dérogation[2] à ce principe accepte de prendre en considération la dette sous la condition du respect d’un formalise strict : acte authentique ou acte sous signature privée ayant acquis date certaine.

C’est ce traitement plus strict que celui prévu pour les prêts contractés auprès de tiers qu’une personne redevable de l’ISF a contesté devant la Cour de cassation par le biais d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), au regard des principes d’égalité des personnes devant la loi et devant les charges publiques garantis par la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen. D’autant plus que dans le même temps, le créancier est tenu de déclarer cette créance à l’actif de son patrimoine taxable.

Les Hauts magistrats ont estimé que cette question n’avait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution et qu’elle présentait un caractère sérieux. Elle a donc été transmise au Conseil constitutionnel.

Voici la question qui a été posée au conseil constitutionnel :

« Les dispositions de l’article 773 du code général des impôts portent-elles atteinte aux droits garantis par la Constitution du 4 octobre 1958 et, plus particulièrement, par les articles 6, 13 et 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen en ce que :

– d’une part, elles assujettissent à un formalisme plus rigoureux un contribuable assujetti notamment à l’impôt de solidarité sur la fortune ayant emprunté des fonds auprès de ses héritiers ou de personnes interposées au sens de l’article 911 du code civil que celui exigé d’un contribuable ayant emprunté des fonds auprès d’un tiers ;

– d’autre part, elles font obstacle, chez l’emprunteur, à la déduction de l’assiette de l’impôt, et notamment de solidarité sur la fortune, d’une dette dont la réalité et la sincérité résultent de l’assujettissement de la créance correspondante au même impôt et au titre de la même période d’imposition du chef du créancier ? »

Patrimoine taxable et trust

L’article 885 G ter du CGI dispose que les biens ou droits placés dans un trust défini à l’article 792-0 bis du même code ainsi que les produits qui y sont capitalisés sont compris, pour leur valeur vénale nette au 1er janvier de l’année d’imposition, selon le cas, dans le patrimoine du constituant ou dans celui du bénéficiaire qui est réputé être un constituant en application du II du même article 792-0 bis.

C’est cette présomption légale d’affectation au patrimoine du constituant d’un trust ou du bénéficiaire réputé constituant que conteste un requérant devant le Conseil d’État, à l’appui de sa demande d’annulation de certains développements de la doctrine administrative en la matière [3]

Il tire notamment argument du fait qu’il n’est nullement tenu compte des caractéristiques de l’acte en vertu duquel le trust a été constitué ; ce rattachement systématique porterait ainsi atteinte au principe d’égalité devant les charges publiques.

Le Conseil d’État a décidé du renvoi de cette question au Conseil constitutionnel. Cependant, comme à son habitude la juridiction administrative n’a pas formalisé le texte de la QPC dans sa décision de renvoi.

Eric DELFLY

VIVALDI-Avocats 


[1] Article 911 Cciv : 

Toute libéralité au profit d’une personne physique ou d’une personne morale, frappée d’une incapacité de recevoir à titre gratuit, est nulle, qu’elle soit déguisée sous la forme d’un contrat onéreux ou faite sous le nom de personnes interposées, physiques ou morales.

Sont présumés personnes interposées, jusqu’à preuve contraire, les père et mère, les enfants et descendants, ainsi que l’époux de la personne incapable

[2] CGI, art. 773, 2° ; BOI-PAT-ISF-30-60-20, 20

[3] BOI-PAT-ISF-30-20-30, 60, 70 et 120

 

 

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