Nullité du contrat de bail

Delphine VISSOL
Delphine VISSOL

 

SOURCE  CA RENNES – 21.06.2017 – n°261 – RG 15/00841.

 

Selon contrat du 28 février 2012, l’office public de l’habitat Vannes Golfe Habitat a donné a bail à M. Narik S. un appartement moyennant le paiement d’un loyer mensuel de 320,48 € révisable, outre 65,94 € d’avance sur charges et le versement d’un dépôt de garantie de 320 €.

 

Le 3 avril 2013, l’office public de l’habitat Vannes Golfe Habitat a mis en demeure son locataire de payer la somme de 1249,61 €.

 

Il s’est avéré que M. Narik S. se nommait en réalité Nariman S. et Mme Esmira D. épouse S., son épouse, Esmira D. épouse S..

 

Suivant acte d’huissier en date du 7 juillet 2014, l’office public de l’habitat Vannes Golfe Habitat a fait assigner M. Nariman S. et Mme Esmira D. épouse S. afin d’obtenir, avec exécution provisoire, à titre principal, sur le fondement de l’article 1116 du code civil, la nullité du contrat de bail en date du 15 mars 2012, et subsidiairement, la résiliation du bail.

 

le tribunal a prononcé la nullité du bail pour dol, sur le fondement de l’article 1116 du code civil , au motif que les locataires ont produit des faux documents pour conclure le bail sous une fausse identité alors que l’organisme bailleur n’aurait jamais conclu ce bail s’il avait eu connaissance de cette fausse identité l’empêchant de faire exécuter tout jugement en cas de manquement par le locataire à ses obligations contractuelles. Il a condamné M. et Mme S. sans droit ni titre au paiement d’une indemnité d’occupation et de dommages et intérêts du fait du non paiement des loyers et charges et les a déboutés de leur demande de délais de paiement.

 

M. et Mme Nariman S. ont libéré les lieux le 24 avril 2015 pour s’installer chez leurs parents et beaux-parents lesquels font l’objet d’une procédure identique et interjeté appel de la décision.

 

Au soutien de leur appel, M. et Mme S. soutiennent que le dol n’est pas caractérisé au motif qu’ils n’ont jamais eu l’intention de frauder, que leurs parents sont arrivés en France en 2003 sous un faux nom par peur des représailles de la communauté russe et que seule leur volonté de reprendre leur identité d’origine, dont le bailleur social a été tenu informé, est à l’origine de la procédure pénale intentée à l’encontre de leur parents pour faux documents et de la suppression des prestations sociales dont les aides au logement. Ils demandent donc à la cour de réformer le jugement en ce qu’il a prononcé la nullité du bail.

 

L’office public de l’habitat Vannes Golfe Habitat rétorque qu’ils ne rapportent aucune preuve des supposées craintes de représailles de la communauté russe à Vannes, que la réalité n’est pas qu’ils ont voulu reprendre leur nom d’origine mais qu’ils y ont été contraints du fait de la procédure pénale engagée contre les parents de M. S. qui avaient également obtenu des titres de séjour sous une fausse identité, que leurs loyers étaient impayés avant même la suppression des aides sociales, que les parents de M. S. chez qui ils résident désormais font l’objet d’une procédure identique devant la cour et ne règlent pas plus leur dette vis à vis de lui. Il demande la confirmation du jugement en ce qu’il a retenu l’existence d’un dol.

 

C’est dans ces circonstances que la Cour d’appel relève que M. S. est seul signataire du bail et ne justifie aucunement ni de la date de son arrivée en France ni des raisons qui ont pu motiver l’établissement d’un titre de séjour sous une fausse identité.

 

La Cour relève par ailleurs qu’il n’est pas contesté que le preneur a produit ce titre de séjour pour obtenir un logement du bailleur social lequel n’aurait à l’évidence pas contracté s’il avait su que le document présenté, à savoir un titre de séjour au nom de Narik S. valable jusqu’au 7 juillet 2012, était un faux et que l’identité de son co-contractant n’était pas exacte, ce qui aurait empêché toute exécution forcée à son égard.

 

Dès lors, la Cour considère qu’il convient de prononcer la nullité du bail d’habitation pour dol du locataire et ce faisant de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a également condamné les preneurs au paiement de leur arriéré locatif, la nullité du contrat de bail ne remettant pas en cause l’existence et l’exigibilité de la dette locative.

 

Delphine VISSOL

Vivaldi-Avocats

Partager cet article