Protection du conditionnement d’un produit par le droit des marques

Virginie PERDRIEUX
Virginie PERDRIEUX

 

SOURCE : Cour d’appel de Bordeaux, 1ère ch. civ., sect. A, 5 novembre 2015, Folies Douces SAS c/ Bourjois SAS, RG n°2014/00502

 

La société Bourjois est titulaire d’une marque tridimensionnelle constituée de la forme d’un fard à paupières cylindrique, cintré et transparent avec des stries obliques juste au-dessus du centre du flacon et une partie supérieure bombée, déposée en classe 3 pour désigner notamment des produits « cosmétiques ».

 

Alertée par la Direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières (DNRED) de ce qu’une certaine société Folie Douces avait fait pénétrer sur le territoire français un lot de 21.480 ombres à paupières présumées reproduire ou imiter sa marque, la société Bourjois a fait assigner le 15 avril 2010 la société Folies Douces devant le Tribunal de grande instance de Bordeaux en contrefaçon de marque et de droits d’auteur.

 

Aux termes de son Jugement du 15 mars 2010, le Tribunal, reconnaissant le caractère distinctif de la marque de la société Bourjois et l’originalité du conditionnement des ombres à paupières « Suivez mon regard », a condamné la société Folies Douces pour contrefaçon de marque et de droits d’auteur.

 

Saisie de l’appel de cette décision, la Cour d’appel de Bordeaux a à nouveau procédé à une analyse préalable de la validité de cette marque tridimensionnelle correspondant au conditionnement d’un produit.

 

A ce titre, la Cour s’est référée aux dispositions de l’article L.711-1 du Code de la propriété intellectuelle, lesquelles sont les suivantes :

 

« La marque de fabrique, de commerce ou de service est un signe susceptible de représentation graphique servant à distinguer les produits ou services d’une personne physique ou morale.

Peuvent notamment constituer un tel signe : (…)

 

c) Les signes figuratifs tels que : dessins, étiquettes, cachets, lisières, reliefs, hologrammes, logos, images de synthèse ; les formes, notamment celles du produit ou de son conditionnement ou celles caractérisant un service ; les dispositions, combinaisons ou nuances de couleurs  ».

 

Ainsi, la forme du conditionnement d’un produit est protégeable à titre de marque, à la condition cependant de respecter les dispositions de l’article L.711-2 du même Code, lequel précise que :

 

« Le caractère distinctif d’un signe de nature à constituer une marque s’apprécie à l’égard des produits ou services désignés.

Sont dépourvus de caractère distinctif : (…)

 

c) les signes constitués exclusivement par la forme imposée par la nature ou la fonction du produit ou conférant à ce dernier sa valeur substantielle ».

 

La Cour a entendu interpréter ce texte en indiquant que, pour être distinctive, la forme doit être arbitraire ou détachée au regard de la nature, de la fonction ou de la valeur du produit, afin notamment de laisser aux concurrents l’accès à certaines formes, et ne doit pas être essentiellement à l’origine de l’achat par le consommateur.

 

En l’espèce, s’agissant d’un fard à paupières tel que celui commercialisé par la société Bourjois, il convient de considérer que sa valeur substantielle résulte des composants, des couleurs et des propriétés du produit lui-même, et non de son conditionnement.

 

Par ailleurs, la forme cylindrique, cintrée et transparente avec des stries obliques juste au-dessus du centre du flacon et la partie supérieure bombée du produit ne sont pas exclusivement dictés par son usage fonctionnel.

 

Le Jugement a donc été confirmé en ce qu’il a reconnu la validité de la marque représentant le conditionnement d’un fard à paupières.

 

Virginie PERDRIEUX

Vivaldi-Avocats

 

 

 

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