SOURCE : 3ème civ., 3 déc. 2015, n° 14-19.146, FS-P + B
En l’espèce, un preneur à bail commercial donne son fonds de commerce en location gérance à une société en 2003. Plusieurs avenants de renouvellements ont été signés, le dernier le 1er juin 2007.
Confronté à la dénonciation du contrat, le locataire-gérant assigne le loueur en requalification du contrat de location gérance en contrat de sous location régi par les dispositions du statut des baux commerciaux, par acte introductif d’instance du 15 décembre 2008.
Le loueur excipe de la prescription biennale, qui ne serait pas acquise, selon le locataire, puisque le point de départ de la prescription devrait être fixé à la date d’effet du renouvellement du contrat.
En effet selon la jurisprudence de la 3ème chambre civile de la Cour de cassation, la requalification d’un contrat de location gérance en bail commercial se prescrit par deux ans à compter de la conclusion du contrat… sauf si un contrat postérieur est conclu entre les parties[1].
Si la tacite reconduction d’un contrat n’a pas pour effet de reporter ce délai de prescription[2], qu’en est-il de la signature d’un avenant de renouvellement ? Une telle convention permet-elle au locataire gérant de pouvoir de nouveau solliciter la requalification du contrat en bail commercial dans le délai biennal ?
La Cour d’appel de Paris y répond par la négative : les « actes qualifiés d’ “avenant en renouvellement” sont sans incidence sur l’existence à l’origine des éléments permettant l’éventuelle requalification du contrat ». La décision est logique, l’avenant étant l’extension du contrat principal, celui-ci est sans effet sur la prescription.
La position de la Cour d’appel est confirmée par la Cour de cassation :
« Mais attendu qu’ayant retenu à bon droit que la demande de la société B & B Paris tendant à la reconnaissance du statut des baux commerciaux était soumise à la prescription biennale de l’article L. 145-60 du code de commerce et que le délai de prescription courait à compter de la conclusion du contrat, la cour d’appel, qui a constaté que le contrat de location gérance avait été conclu le 18 juillet 2003, en a exactement déduit que l’action engagée par la société B & B Paris, les 15 et 16 décembre 2008, était prescrite, peu important que le contrat ait été renouvelé par avenants successifs ».
La conclusion d’un avenant de renouvellement n’a donc pas pour effet de reculer le délai de prescription de l’action en requalification du contrat en bail commercial.
Cependant, qu’en serait-il si les parties avaient conclu, non pas un avenant de renouvellement, mais un véritable nouveau contrat de location gérance, autonome par rapport au précédent ? A priori, le locataire gérant aurait pu, dans ce cas, solliciter la requalification du « nouveau » contrat de location gérance en bail commercial, dans les deux ans de sa signature.
Sylvain VERBRUGGHE
Vivaldi-Avocats
[1] Cf 3ème civ, 22 janvier 2013, n°11-22984, Inédit et notre commentaire du 10 juin 2013
[2] Cf Cass. Com., 11 juin 2013, n°12-16103, FS-P+B et notre commentaire du 28 juin 2013