SOURCE : 2ème civ. 30 janvier 2014. n°12-29.191 . Numéro JurisData : 2014-001284
La Cour de Cassation a été amenée à se prononcer sur la question de savoir si en l’état du défaut d’annexion de la procuration donnée par un emprunteur à l’acte de prêt, lequel ne mentionne pas son dépôt au rang des minutes, faisait perdre à l’acte son caractère authentique, de sorte que l’établissement bancaire ne justifiait plus d’un titre exécutoire pouvant fonder les poursuites.
En l’espèce, sur des poursuites de saisie immobilière engagées par une banque sur le fondement d’un acte notarié de prêt, dressé par un Notaire, à l’encontre de l’emprunteur, ce dernier, à l’audience d’orientation a sollicité qu’il soit jugé que cet acte notarié ne valait pas titre exécutoire.
Pour faire droit à la demande de l’emprunteur, et déclarer nul le commandement de payer valant saisie et ordonner à la banque de donner mainlevée et de faire radier ce commandement, l’arrêt retient que la procuration de l’emprunteur n’est pas annexée à l’acte de prêt et que ce dernier ne fait pas mention de son dépôt au rang des minutes du Notaire.
La Cour d’Appel a en conséquence admis que la Banque ne disposait pas d’un titre exécutoire pouvant fonder ses poursuites.
La Cour de Cassation censure la Cour d’Appel et casse l’arrêt.
En effet, la Haute Cour admet que l’inobservation de l’obligation pour le Notaire, de faire figurer les procurations en annexe de l’acte authentique ou de les déposer au rang de ses minutes, mention de ce dépôt étant fait dans l’acte dans l’acte, ne fait pas perdre à l’acte son caractère authentique, partant son caractère exécutoire.
La Cour de Cassation considère que la Cour d’Appel a violé les dispositions des articles 8 et 23 du décret du 26 novembre 1971 relatif aux actes établis par les notaires, dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2005-973 du 10 août 2005, ensemble l’article 1318 du Code Civil.
Les articles 8 et 23 précités disposent que les procurations sont annexées à l’acte à moins qu’elles ne soient déposées aux minutes du Notaire et dans ce cas, il est fait mention dans l’acte de dépôt de la procuration au rang des minutes.
De sorte qu’en application de l’article 1318 du Code Civil qui dispose que « L’acte qui n’est point authentique par l’incompétence ou l’incapacité de l’officier, ou par défaut de forme, vaut comme écriture privée, s’il a été signé des parties ».
En conséquence, l’inobservation des obligations susénoncées ne fait pas perdre à l’acte son caractère authentique, partant son caractère exécutoire.
La 1ère Chambre Civile de la Cour de Cassation[1] s’était déjà prononcé en ce sens le 22 mars 2012, et plus précisément sur la distinction des exigences formelles requises, pour un acte notarié d’origine, au regard de sa copie qui constitue le titre exécutoire remis au créancier.
En l’espèce, un établissement bancaire a fait délivrer un commandement aux fins de saisie à son débiteur sur le fondement d’un prêt notarié.
Le débiteur saisi a soulevé devant le premier juge le non-respect du décret du 26 novembre 1971 relatif aux actes établis par les notaires, dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2005-973 du 10 août 2005.
La Cour d’Appel va prononcer l’annulation du commandement de payer valant saisie, pour défaut de titre exécutoire.
La Cour d’Appel, considèrait en effet, que l’absence d’annexion des procurations à l’acte de vente et de mention indiquant que ces procurations avaient été déposées au rang des minutes du Notaire, ne sont pas sanctionnées par la nullité de l’acte notarié mais affecte la validité des signatures des parties, portant ainsi atteinte à la force exécutoire de l’acte.
Dans son pourvoi, le créancier saisissant soutenait que si les procurations doivent être annexées à l’acte notarié ou déposées au rang des minutes du notaire, cette exigence n’est applicable qu’à la minute elle-même et non pas à la copie exécutoire délivrée au créancier, ce d’autant qu’il n’était pas contesté que lesdites procurations existaient et avaient bien été déposées au rang des minutes du Notaire.
Cette analyse a été accueillie par la Cour de Cassation, laquelle au visa des articles 8, 15 et 23 du décret du 26 novembre 1971 (dans sa rédaction antérieure au décret n° 2005-973 du 10 août 2005) a considéré que l’irrégularité du au non-respect des dispositions de l’article 8 n’est pas sanctionné par la nullité de l’acte en tant que titre exécutoire.
La Cour de Cassation a soumis à sa censure l’arrêt de la Cour d’Appel qui a annulé la procédure de saisie immobilière.
Geneviève FERRETTI
Vivaldi-Avocats
[1] COUR DE CASSATION, 1ère Chambre Civile. 22 mars 2012. Pourvoi n°11-11-.925. Arrêt n°362 F-P+B+I