Impossibilité pour le Liquidateur de transiger sur les sanctions personnelles

Etienne CHARBONNEL
Etienne CHARBONNEL - Avocat associé

Source : Cass. Com 9 décembre 2020 – Pourvoi n° 19-17.258 n°747 P + B

 

Dans cette affaire, un Liquidateur avait engagé une action visant à obtenir, à l’encontre de l’ancien dirigeant de la société en Liquidation qu’il représentait, à la fois des sanctions pécuniaires (comblement de l’insuffisance d’actif), mais également des sanctions personnelles/professionnelles (faillite personnelle ou à défaut interdiction de gérer).

 

En cours de procédure, un accord est trouvé entre le Liquidateur et l’ancien dirigeant.

 

Le dirigeant consent un abandon de ses propres créances envers la Liquidation, et accepte de payer une somme pour solde de tout compte.

 

En contrepartie, le Liquidateur renonce à l’ensemble des demandes au titre des sanctions, à savoir à la fois les sanctions pécuniaires mais également les sanctions personnelles.

 

La transaction fait l’objet d’une homologation par le Tribunal de Commerce.

 

Cependant, le Procureur de la République fait appel de la transaction et obtient gain de cause en appel, la Cour jugeant que si le Liquidateur est bien fondé à transiger quant aux sanctions pécuniaires, il n’a en revanche pas la possibilité de transiger s’agissant des sanctions professionnelles.

 

La Cour de Cassation rejette le pourvoi introduit par le dirigeant, et valide l’analyse de la Cour d’appel.

 

Sans grande surprise d’ailleurs, elle juge en effet, sur le fondement de l’article 2045 du Code Civil, que pour transiger, « il faut avoir la capacité de disposer des objets compris dans la transaction ».

 

Or, le Liquidateur Judiciaire défend l’intérêt collectif des créanciers, mais n’est en revanche pas le garant de l’intérêt général.

 

En matière de sanctions, la sanction pécuniaire vise à obtenir, à l’encontre du dirigeant, un comblement de l’insuffisance d’actif qui bénéficiera collectivement aux créanciers. En conséquence, le Liquidateur peut valablement transiger sur ce point.

 

En revanche, s’agissant des sanctions professionnelles/personnelles que sont la faillite personnelle et l’interdiction de gérer, elles ont pour objet la protection de l’intérêt général, en excluant le dirigeant du tissu économique pour une durée pouvant aller jusqu’à 15 ans.

 

Cet intérêt général n’est pas défendu par le Mandataire Judiciaire, qui n’est donc pas fondé à transiger sur ce point.

 

Ainsi, le Liquidateur Judiciaire ne peut transiger que sur les sanctions pécuniaires, et non les sanctions personnelles/professionnelles.

 

Attention toutefois, la transaction doit intervenir avant toutes condamnations, selon la jurisprudence de la Cour de Cassation qui a validé ce type de transactions, dès lors qu’elle intervient bien avant le jugement de condamnations[1].

 

[1] Voir à cet effet Cass. Com 8 mars 2017 – Pourvoi n°15-16.005 publié au Bulletin

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