Un Maire est incompétent pour se prononcer sur une demande de protection fonctionnelle lorsqu’il est personnellement mis en cause pour des faits de harcèlement moral !

Eloïse LIENART
Eloïse LIENART
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La Cour administrative d’appel de Douai juge que le principe d’impartialité fait obstacle à ce qu’un Maire se prononce sur une demande de protection fonctionnelle formulée par un agent lorsqu’elle vise des faits de harcèlement moral qui le concerne personnellement et qui comporte des éléments de fait susceptibles d’en présumer l’existence.

Source : CAA de DOUAI, 3ème chambre, 03 février 2022, n° 20DA02055

En l’espèce, un agent municipal contestait le refus implicite du Maire de lui accorder la protection fonctionnelle à raison de faits de harcèlement moral dont il estimait être victime, notamment de la part du Maire lui-même, dans le cadre de ses fonctions. Le Tribunal administratif d’Amiens avait rejeté sa demande tendant à l’annulation de cette décision implicite.

Prévue à l’article 11 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dorénavant codifiée aux articles L134-1 à L134-12 du Code général de la fonction publique, la protection fonctionnelle est accordée aux agents publics victimes d’une infraction à l’occasion ou en raison de leurs fonctions.

Cette protection est justifiée par la nature spécifique des missions confiées aux agents publics qui les exposent parfois, dans l’exercice de leurs fonctions, à des relations conflictuelles avec les usagers du service public et qui leur confèrent des prérogatives pouvant déboucher sur la mise en cause de leur responsabilité personnelle, civile ou pénale.

Elle n’est normalement pas applicable aux différends susceptibles de survenir, dans le cadre du service, entre un agent public et l’un de ses supérieurs hiérarchiques, sauf lorsque les actes du supérieur hiérarchique sont, par leur nature ou leur gravité, insusceptibles de se rattacher à l’exercice normal du pouvoir hiérarchique. 

La Cour relève que par principe, l’autorité compétente pour se prononcer sur une demande de protection fonctionnelle, lorsqu’elle n’a pas été déléguée, est le Maire de la commune en vertu des dispositions de l’article L. 2122-8 du Code général des collectivités territoriales.

Consciente que la compétence du Maire pouvait s’avérer discutable lorsque la demande de protection fonctionnelle vise des faits de harcèlement moral qui le concerne personnellement, la Cour se fonde sur le principe d’impartialité qui fait obstacle à ce que le supérieur hiérarchique mis en cause à raison de tels actes ne puisse régulièrement statuer sur cette demande présentée pour ce motif par son subordonné, quand bien même il n’aurait pas délégué sa compétence sur ce point.

Dans ce cas de figure, la Cour considère que le Maire de la commune doit transmettre la demande à l’un de ses adjoints ou à l’un des conseillers municipaux.

La Cour rappelle néanmoins la jurisprudence administrative classique en matière d’harcèlement moral, selon laquelle il appartient à l’agent public qui soutient avoir été victime d’agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre, à l’appui de sa demande de protection fonctionnelle, des éléments de fait susceptibles de faire présumer l’existence d’un tel harcèlement.

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