Travaux d’amélioration de la performance énergétique dans les bâtiments tertiaires

Sylvain VERBRUGGHE
Sylvain VERBRUGGHE

 

SOURCE : Décret n° 2017-918 du 9 mai 2017 relatif aux obligations d’amélioration de la performance énergétique dans les bâtiments existants à usage tertiaire

 

Annoncé dans la Loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010, le décret relatif aux obligations d’amélioration de la performance énergétique dans les bâtiments existants de plus de 2.000 m² a été publié au Journal Officiel le 10 mai 2017.

 

I – Présentation du dispositif

 

Le décret concerne les immeubles à usage tertiaire ou de service public (art R131-38 du code de la construction et de l’habitation – CCH).

 

Il porte sur une obligation de diminution de la consommation énergétique de ces bâtiments de 25% d’ici à 2020, puis de 40% d’ici à 2030 pour parvenir, en 2050, à une réduction de 60% de la consommation énergétique de ces bâtiments conformément aux dispositions de l’article L111-10-3 du CCH modifiée par l’article 17 de la loi n°2015-992 du 17 août 2015 :

 

« Des travaux d’amélioration de la performance énergétique sont réalisés dans les bâtiments existants à usage tertiaire ou dans lesquels s’exerce une activité de service public dans un délai de huit ans à compter du 1er janvier 2012. Cette obligation de rénovation est prolongée par périodes de dix ans à partir de 2020 jusqu’en 2050 avec un niveau de performance à atteindre renforcé chaque décennie, de telle sorte que le parc global concerné vise à réduire ses consommations d’énergie finale d’au moins 60 % en 2050 par rapport à 2010, mesurées en valeur absolue de consommation pour l’ensemble du secteur.

 

Un décret en Conseil d’Etat détermine la nature et les modalités de cette obligation de travaux, applicable pour chaque décennie, notamment les caractéristiques thermiques ou la performance énergétique à respecter, en tenant compte de l’état initial et de la destination du bâtiment, de contraintes techniques exceptionnelles, de l’accessibilité des personnes handicapées ou à mobilité réduite ou de nécessités liées à la conservation du patrimoine historique. Il précise également les conditions et les modalités selon lesquelles le constat du respect de l’obligation de travaux est établi et publié en annexe aux contrats de vente et de location. Le décret en Conseil d’Etat applicable pour la décennie à venir est publié au moins cinq ans avant son entrée en vigueur. »

 

Le caractère particulièrement ambitieux de ce texte et de son décret d’application est connu, le Conseil National d’Evaluation des Normes ayant estimé, dans son dernier rapport d’activité, que le coût de la réforme pour les collectivités territoriales avoisinerait à lui seul 4,41 milliards d’euros, sur les 6,9 Mds€ d’euros de charges supportées par les collectivités par les normes nouvelles (contre 556 M€ en 2015)[1].

 

II – Biens concernés par le dispositif

 

Le décret s’adresse aux immeubles ou parties d’immeubles, de plus de 2000 m², appartenant à un propriétaire unique[2], dans lesquels sont exploités des activités de bureaux, hôtels, commerces, enseignement ou administration. Il ne s’adresse cependant ni aux constructions provisoires, ni aux monuments historiques sous condition (art R131-40).

 

III – Mise en œuvre du dispositif

 

La mise en œuvre du dispositif repose essentiellement sur la réalisation d’un audit énergétique du bâtiment (art R131-42) effectué par les propriétaires ou locataires (art R131-44-I) des bâtiments tertiaires concernés par le décret.

 

L’audit devra être transmis avant le 1er juillet 2017 (art R131-46) à un organisme désigné par le ministre en charge de la construction (l’ADEME ?). Ce délai semble particulièrement court, d’autant que la mise en application de cette disposition nécessite « un arrêté conjoint des ministres chargés de la construction et de l’énergie » concernant « le contenu et les modalités de réalisation des études énergétiques », les seuil de consommation d’énergie » et « les modalités et les formats électroniques de transmission des documents visés par le texte »(art R131-50).

 

Lors de cet audit, le « diagnostiqueur », s’il constate que la consommation énergétique est supérieur au seuil règlementaire (art 131-39 b), propose des plans d’action permettant de diminuer le 25% la consommation énergétique de l’immeuble, par rapport soit à sa consommation actuelle, soit si des travaux à vocation énergétiques ont été entrepris depuis 2006, par rapport à la consommation énergétique antérieure à l’exécution des travaux, de manière à ne pas pénaliser les acteurs vertueux. Il complète sa mission en proposant un plan d’action visant à réduire de 40% la consommation de référence.

 

Ensuite, au plus tard le 1er juillet 2018, puis chaque 1er juillet des années suivantes, les propriétaires ou locataires des bâtiments tertiaires concernés par le décret devront transmettre à ce même organisme l’état des consommations énergétiques des années précédentes (art R131-46)

 

Enfin, avant le 1er juillet 2020, un bilan complet sur les travaux menés et les économies d’énergie réalisées est adressés à l’organisme susmentionné.

 

IV – Difficulté liées à l’exécution du plan énergétique

 

Si les plans d’actions ne permettent pas un retour sur investissement sur 10 ans pour les collectivités territoriales, ou 5 ans pour les autres acteurs économiques, ou si le coût estimatif total est supérieur à 200 € HT/m² de surface utile, le propriétaire ou locataire de l’immeuble définissent, sur la base de l’étude énergétique, un nouveau plan d’action et un nouvel objectif de diminution des consommations, conforme aux préconisations de l’audit énergétique, en adaptant la durée d’exécution des travaux.

 

En cas de non atteinte des objectifs, « les propriétaires occupants ou, dans le cas des locaux pris à bail, les bailleurs et preneurs, tiennent à disposition de l’autorité compétente tous justificatif de nature technique ou juridique dont ils disposent et qui expliquent la non-atteinte des objectifs malgré les actions et travaux entrepris par ailleurs visant à diminuer les consommations énergétiques des bâtiments ou parties de bâtiments concernés. »(art R131-47). Ces justificatifs seront définis par arrêté conjoint des ministres chargés de la construction et de l’énergie (art R131-50).

 

A noter toutefois que ces objectifs peuvent être atteints soit à l’échelle du bâtiment, soit à l’échelle de l’ensemble du parc immobilier du propriétaire (art 131-48).

 

V – Sanctions

 

Le texte est silencieux sur les sanctions en cas de manquement aux dispositions légales et règlementaires.

 

Réforme à suivre.

 

Sylvain VERBRUGGHE

Vivaldi-Avocats


[1] Cf Rapport public d’activité CNEN 2016, page 26

[2] L’immeuble de 3.000 m² détenu par deux propriétaires disposant chacun d’une quote part de 1.500 m², c’est-à-dire en deçà du seuil, en serait donc exclu.

 

 

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