SOURCE : Arrêt de Chambre Sociale de la Cour de Cassation du 26 janvier 2022, n°20-15.755 (FS-B)
Une salariée a été engagée dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée le 11 septembre 1995 en qualité de responsable marketing et développement, puis a été désignée aux fonctions de directeur des ventes ressortant de la catégorie cadre.
Son contrat de travail comportait une clause de non-concurrence assortie d’une contrepartie financière, payable chaque mois pendant douze mois après la cessation du contrat de travail, l’employeur pouvant notifier au salarié sa décision de renoncer au bénéfice de ladite clause, à tout moment durant le préavis ou dans un délai maximum d’un mois à compter de la fin du préavis (ou en l’absence de préavis, de la notification du licenciement).
La salariée ayant sollicité auprès de sa direction la rupture conventionnelle de son contrat de travail, l’employeur et la salariée ont décidé, d’un commun accord, de se séparer dans le cadre d’une rupture conventionnelle homologuée, la rupture du contrat de travail étant intervenue le 05 mai 2015.
Par courrier du 14 août 2015, la salariée a signalé à son ancien employeur qu’il n’avait pas estimé devoir la libérer de ses obligations en matière de non-concurrence et lui demandait, en conséquence de lui adresser la contrepartie financière correspondant à cette obligation pour la période courant depuis la rupture de son contrat de travail.
L’employeur s’est opposé au règlement de cette somme par un courrier du 11 septembre 2015, de sorte que la salariée a saisi le Conseil des Prud’hommes aux fins de voir condamner son employeur à lui verser diverses sommes à titre de contrepartie mensuelle du respect de sa clause de non-concurrence et d’indemnités compensatrices de congés payés y afférents.
En cause d’appel, cette affaire arrive par-devant la Cour d’Appel de LYON laquelle, dans un Arrêt du 19 février 2020, va accueillir la demande de paiement de la salariée du versement de la contrepartie financière de son obligation de non-concurrence pour la période du 05 mai 2015 au 11 septembre 2015, la date du 11 septembre 2015 correspondant à la date à laquelle la salariée avait été informée de la volonté de son employeur de renoncer au bénéfice de cette clause dont le sort n’avait pas été réglé par la convention de rupture conventionnelle.
Toutefois, la Cour d’Appel rejette la demande de la salariée du paiement d’une indemnité de congés payés afférents à la contrepartie financière de la clause de non-concurrence, considérant que s’agissant d’une contrepartie financière, certes calculée sur la base du salaire, mais payable postérieurement à la rupture du contrat de travail, elle n’ouvre pas droit à des congés payés.
Ensuite de cette décision, l’employeur et la salariée forment un pourvoi en Cassation.
La Chambre Sociale de la Haute Cour va censurer l’Arrêt d’appel sur deux points.
Tout d’abord concernant la renonciation par l’employeur à l’exécution de l’obligation de non-concurrence, elle souligne que le salarié ne peut être laissé dans l’incertitude quant à l’étendue de sa liberté de travailler et indique qu’il en résulte qu’en matière de rupture conventionnelle, l’employeur, s’il entend renoncer à l’exécution de la clause de non-concurrence, doit le faire au plus tard à la date de rupture fixée par la convention, nonobstant toute stipulation ou disposition contraire. Elle en conclut que l’Arrêt d’appel qui a considéré que la salariée n’était fondée à solliciter la contrepartie financière de son obligation de respecter la clause de non-concurrence, que pour la période du 05 mai au 11 septembre 2015, alors qu’elle avait constaté que la date de rupture fixée par les parties dans la convention de rupture était le 05 mai 2015, ce dont il résultait que la renonciation par l’employeur au bénéfice de la clause de non-concurrence intervenue le 11 septembre 2015 était tardive, elle en déduit que la Cour d’Appel a violé les dispositions de l’article L.1237-13 du Code du Travail.
En outre, sur la demande d’indemnité de congés payés afférents à la contrepartie financière de la clause de non-concurrence, rejetée par la Cour d’Appel, la Chambre Sociale de la Haute Cour rappelle qu’il résulte des dispositions du Code du Travail que la contrepartie financière de l’obligation de non-concurrence ayant la nature d’une indemnité compensatrice de salaire, elle ouvre droit à congés payés, contrairement à ce qu’a jugé la Cour d’Appel.
Par suite, elle casse et annule l’Arrêt d’appel.