SOURCE: Cass com., 8 mars 2017, n°15-21397, F-P+B+I
L’ouverture d’une procédure collective n’a pas pour effet d’entrainer la résiliation des contrats en cours, toute clause contraire étant réputée non écrite.
Afin d’être fixé sur le sort d’un contrat conclu avant l’ouverture de la procédure collective, le cocontractant peut mettre en demeure l’administrateur ou le liquidateur de prendre position sur la poursuite du contrat en cours. En effet, le silence gardé par le mandataire plus d’un mois à compter de la réception de la notification entraine la résiliation du contrat[1].
Cette interpellation n’est toutefois pas obligatoire[2], de sorte que de nombreux cocontractant s’en dispensent : le contrat se poursuit jusqu’à la prise de position définitive du mandataire[3], qui ne peut se réfugier derrière son silence ou l’absence de mise en demeure pour s’abstenir d’honorer les échéances du contrat[4].
Au-delà de la mise en demeure de prendre parti, en cas de liquidation judiciaire, l’article L641-11-1 III 2° prévoit que l’absence de paiement au comptant des échéances contractuelles par le liquidateur permet au créancier d’obtenir de Monsieur le Juge Commissaire la résiliation du contrat.
Tel est le cas en l’espèce, dans laquelle un cocontractant a obtenu de la Cour d’appel de Toulouse la résiliation du bail au titre du non paiement, par le liquidateur des redevances d’un contrat de foretage, dues dans le cadre de l’exploitation d’une carrière.
Le liquidateur prétendait que la résiliation n’était encourue qu’au terme d’une mise en demeure préalable d’avoir à se positionner sur la poursuite du contrat ou d’option expresse sur la poursuite de la convention. Il rappelait que l’article L641-11-1 III du Code de commerce liste les cas de résiliation d’un contrat, ainsi résumés :
1. « Après une mise en demeure de prendre parti sur la poursuite du contrat », ce qui n’a pas été fait en l’espèce ;
2. « A défaut de paiement dans les conditions définies au II et d’accord du cocontractant pour poursuivre les relations contractuelles », c’est-à-dire lorsque le liquidateur a exigé la poursuite du contrat sans procéder au paiement. Or, le liquidateur n’avait pas exigé la poursuite du contrat ;
3. « Lorsque la prestation du débiteur porte sur le paiement d’une somme d’argent, au jour où le cocontractant est informé de la décision du liquidateur de ne pas poursuivre le contrat », décision que n’avait pas prise le liquidateur ;
En conséquence, la résiliation du bail pour non paiement des redevances ne figure pas dans la liste des causes de résiliation : selon le liquidateur, il incombait au contractant de lui adresser la mise en demeure de prendre parti, pour être contraint d’opter pour la poursuite du contrat ou sa résiliation, avant d’exercer son action devant le juge commissaire.
La Cour de cassation ne partage pas son interprétation de l’article L641-11-1 III 2° du Code de commerce, et considère que l’action en résiliation du cocontractant peut être poursuivie sur la base d’une option tacite du liquidateur sur la poursuite du contrat, sans qu’il ne soit nécessaire de délivrer préalablement une mise en demeure de prendre parti.
L’arrêt des juges du fond précisant que le liquidateur entendait, dans ses conclusions, poursuivre le contrat, les Hauts juges estiment que le liquidateur a pu tacitement opter pour la poursuite du contrat, permettant au cocontractant de saisir directement Monsieur le Juge commissaire d’une demande de résiliation du bail pour non paiement des redevances postérieures.
Sylvain VERBRUGGHE
Vivaldi-Avocats
[1] Article L641-11-1 III 1° du Code de commerce
[2] Cass com, 20 juin 2000, 97-18.204, Publié au bulletin
[3] Cass com., 24 mars 2015, n°14-15139 ; Cass com., 7 novembre 2006, n°05-17112 ; Cass com., 5 juillet 2005, n°04-12337
[4] Cass com., 2 avril 1996, n°94-14651