Limite de la protection attachée à l’exercice d’un mandat de représentant du personnel : quand le fait d’être salarié protégé ne donne pas tous les droits.

Christine MARTIN
Christine MARTIN - Avocat associée

SOURCE : Arrêt du Conseil d’Etat, 1ère et 4ème Chambres réunies, du 10 juillet 2019, n° 408644.

 

Un salarié de la Mission Locale de Haute-Garonne ayant la qualité de salarié protégé a formé un recours à l’encontre de la décision du 22 février 2012 par laquelle le Ministre du Travail a autorisé la Mission Locale de Haute-Garonne à le licencier.

 

La Cour Administrative d’Appel ayant annulé le jugement du Tribunal Administratif rejetant la demande du salarié d’annulation pour excès de pouvoir de la décision du Ministre du Travail ayant autorisé l’employeur à le licencier, le salarié s’est pourvu en cassation.

 

Concernant le motif du licenciement, le Conseil d’Etat rappelle que le licenciement des salariés représentants du personnel ne peut intervenir que sur autorisation de l’Inspecteur du Travail compte tenu de la protection exceptionnelle dont ils bénéficient et que lorsque leur licenciement est envisagé, il doit être vérifié que celui-ci n’est pas en rapport avec des les fonctions représentatives exercées ou avec leur appartenance syndicale.

 

Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient en conséquence à l’Inspecteur du Travail, et le cas échéant au ministre compétent, de rechercher si les faits reprochés sont d’une gravité suffisante pour justifier le licenciement compte tenu de l’ensemble des règles applicables au contrat de travail et des exigences propres à l’exécution normale du mandat dont est investi le salarié.

 

Puis, le Conseil d’Etat rappelle qu’un agissement du salarié intervenu en dehors de l’exécution de son contrat de travail ne peut motiver un licenciement pour faute sauf s’il traduit la méconnaissance par l’intéressé d’une obligation découlant de ce contrat.

 

A cet égard, le Conseil d’Etat relève que le fait pour un salarié d’utiliser les outils informatiques mis à sa disposition par l’employeur pour s’introduire dans la messagerie professionnelle d’un autre salarié sans l’accord de celui-ci et y détourner de la correspondance ayant explicitement un caractère personnel, doit être regardé comme une méconnaissance de l’obligation de loyauté découlant du contrat de travail, alors même que ces faits seraient commis en dehors des heures de travail, alors que le salarié n’est pas sur son lieu de travail.

 

Le Conseil d’Etat va souligner qu’il ressort des pièces du dossier que le salarié s’était introduit dans la messagerie professionnelle d’une autre salariée de l’entreprise en vue de lire la correspondance échangée par celle-ci avec le Directeur de la Mission Locale, et a en particulier accédé aux messages qu’elle avait classés dans un dossier expressément identifié comme ayant un caractère personnel.

 

Par suite, le Conseil d’Etat considère que le salarié n’est pas fondé à soutenir que les faits en question ne constituent pas une violation des obligations découlant de son contrat de travail susceptibles de faire l’objet d’une sanction disciplinaire.

 

Le Conseil d’Etat relève que le salarié n’est pas non plus fondé à soutenir que ces faits commis par un salarié exerçant des fonctions d’encadrement ne revêtent par un caractère de gravité de nature à justifier son licenciement.

 

En conséquence, le Conseil d’Etat rejette la requête du salarié et valide le licenciement intervenu.

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