Licenciement économique : précisions quant à l’obligation de l’employeur de mettre en œuvre un PSE en cas de modification du projet de réorganisation aboutissant à un licenciement collectif de moins de 10 salariés

Christine MARTIN
Christine MARTIN - Avocat associée

 

SOURCE : Arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de Cassation du 24 janvier 2018 n°16-22.940 FS- P+B

 

Un salarié avait été engagé par contrat à durée indéterminée le 1er octobre 2002 en qualité d’ouvrier, puis en qualité de chef de quai agent de maîtrise par avenant du 6 septembre 2007, par une société employant plus de 90 salariés exerçant une activité dans la fabrication et la vente de stores.

 

Dans le cadre d’un projet de restructuration impliquant le déménagement d’une partie du site, la société après consultation des institutions représentatives du personnel, a notifié aux 10 salariés bénéficiant d’une clause de mobilité leur transfert sur le nouveau site et a proposé par lettre recommandée avec accusé de réception du 14 décembre 2012 à 36 salariés, dont le salarié concerné, la modification de leur contrat de travail pour motif économique.

 

Par courrier recommandé avec accusé de réception du 2 janvier 2013, le salarié a refusé la modification de son contrat de travail de même que 20 autres salariés.

 

Convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement le 29 mars 2013, le salarié a accepté par courrier recommandé avec accusé de réception du 4 avril 2013 le contrat de sécurisation professionnelle qui lui était soumis de sorte que le contrat de travail a été rompu d’un commun accord le 22 avril 2013.

 

Toutefois, contestant le bienfondé de la rupture de son contrat de travail, le salarié a saisi le Conseil des Prud’hommes de NICE le 2 mai 2013, d’une demande de condamnation de son employeur au paiement d’indemnités de rupture et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, soutenant que l’employeur avait pour obligation de mettre en œuvre un plan de sauvegarde de l’emploi, dès lors que 46 salariés étaient concernés par la restructuration et que l’origine économique du transfert de site aurait dû conduire l’employeur à soumettre au salarié bénéficiant d’une clause de mobilité la modification de leur contrat de travail.

 

Il soutient, en outre, que parmi les 21 salariés ayant refusé la modification de leur contrat de travail, seuls 9 ont fait l’objet d’une procédure de licenciement, les autres ayant été maintenus artificiellement sur l’ancien site afin de contourner l’obligation de mise en œuvre d’un PSE.

 

Débouté par les premiers juges, le salarié relève appel de ce jugement.

 

La Cour d’Appel d’AIX-EN-PROVENCE dans un arrêt du 30 juin 2016, considérant que l’employeur avait la possibilité de renoncer à la modification du contrat de travail refusée par un salarié et n’a engagé une procédure de licenciement économique qu’à l’égard de 9 salariés, sans envisager le licenciement des autres salariés ayant refusé la modification de leur contrat, ne pouvait se voir imposer l’obligation d’établir un PSE de sorte que le détournement de procédure reproché à l’employeur par le salarié visant à échapper l’élaboration d’un PSE n’est pas caractérisée.

 

Par suite, la Cour d’Appel confirme la décision des premiers juges.

 

En suite de cette décision, le salarié forme un pourvoi en cassation.

 

A l’appui de son pourvoi, le salarié prétend que l’employeur qui avait proposé à 36 salariés une modification de leur lieu de travail pour des raisons économiques, avaient implicitement mais nécessairement envisagé leur licenciement pour motif économique de sorte que l’entreprise était dans l’obligation de mettre en œuvre un plan de sauvegarde de l’emploi.

 

Par ailleurs, le salarié prétend également que les premiers juges n’ont pas correctement apprécié les pièces soumises à leur examen considérant qu’il ressortait de la note économique remise aux institutions représentatives du personnel le 27 novembre 2012 concernant le projet de réorganisation que la lettre type de proposition de modification du contrat de travail adressée aux 36 salariés démontrait que leur licenciement était envisagé en cas de refus de modification.

 

Mais la Chambre Sociale ne va pas suivre le salarié dans son interprétation.

 

Relevant que l’article L.1233-25 du Code du Travail ne fait obligation à l’employeur de mettre en œuvre un plan de sauvegarde de l’emploi que lorsque 10 salariés au moins ont refusé la modification d’un élément essentiel de leur contrat de travail pour l’un des motifs économiques énoncés à l’article L.1233-3 et que leur licenciement est envisagé, et qu’après avoir constaté qu’à la suite du refus de 21 salariés de voir modifier leur contrat de travail et être muté sur le nouveau site, la société a modifié son projet de réorganisation pour maintenir une partie de son activité et des emplois sur l’ancien site et a procédé à une nouvelle consultation des représentants du personnel sur un projet de licenciement économique collectif concernant moins de 10 salariés, la Cour d’Appel en a déduit à bon droit que l’employeur n’était pas tenu de mettre un œuvre un plan de sauvegarde de l‘emploi.

 

Par suite, la Chambre Sociale rejette le pourvoi.

 

Christine Martin

Associée

Vivaldi-Avocats

 

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