L’Exécution par un tiers d’une obligation assortie d’une astreinte : conséquences sur la liquidation de l’astreinte

Marion MABRIEZ
Marion MABRIEZ - Avocat

Source : Cour de cassation 10 décembre 2020 (19-16.312) Deuxième chambre civile

 

I –

 

Des locataires se plaignaient de désordres dans un lot de copropriété qu’ils occupaient, les amenant à solliciter la désignation d’un expert judiciaire.

 

Par la suite, les locataire ont assigné leur bailleur et ont obtenu d’une Cour d’appel la condamnation de ce dernier sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé un délai de deux mois à compter de l’arrêt, à confier à un bureau d’études « structure » de son choix la recherche de la descente de charges de l’immeuble entier, de la toiture aux fondations, en recherchant les poussées latérales sur les murs porteurs et à faire établir un projet de rénovation par un architecte qualifié tel que prescrit dans les différents rapports de l’expert judiciaire qui avait été désigné.

 

Ultérieurement, et à la demande des locataires, la Cour d’appel a liquidé l’astreinte à une certaine somme pour la période courue entre le 21 août 2016 et le 22 octobre 2017 et condamné le bailleur à payer cette somme aux locataires.

 

Cependant, la Cour d’appel a débouté les locataires de leurs demandes tendant à ce que soit liquidée l’astreinte du 23 octobre 2017 au 20 juin 2018, que soit en outre liquidée l’astreinte jusqu’à la date de l’arrêt à hauteur de 100 euros par jour à compter du 21 juin 2018 et que soit enfin fixée l’astreinte au taux journalier de 500 euros à compter de l’arrêt statuant sur la liquidation de l’astreinte.

 

En effet, et selon la Cour, un contrat avait été régularisé entre un bureau d’études structure et le syndic de la Résidence le 23 octobre 2017, et dans ces conditions, l’obligation étant exécutée à compter du 23 octobre 2017, il n’y avait donc lieu à la liquidation des astreintes postérieures à cette date.

 

Les locataires ont donc formé un pourvoi en cassation.

 

II –

 

Ces derniers soutenaient notamment que le devis établi par le cabinet DMI structure avait été accepté le 23 octobre 2017 par le syndic de copropriété et non pas par le bailleur et que le montant de l’astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l’injonction a été adressée et des difficultés qu’il a rencontrées pour l’exécuter.

 

Par arrêt en date du 10 décembre 2020, la Cour de Cassation a rejeté le pourvoi formé par les locataires.

 

La cour rappelle qu’il résulte de la combinaison des articles L. 131-1 et L. 131-4 du code des procédures civiles d’exécution, que, dès l’instant où l’obligation assortie d’une astreinte a été exécutée, fût-ce par un tiers, l’astreinte ne peut plus donner lieu à liquidation pour la période de temps postérieure à cette exécution, sauf si le créancier justifie d’un intérêt légitime à ce qu’elle soit exécutée par le débiteur lui-même.

 

Or, dans les faits, la Haute Juridiction précise que le bailleur avait pris contact avec le bureau d’études mais n’avait pas signé la proposition d’honoraires qui lui avait été soumise.

 

Cependant, le syndic de copropriété a régularisé avec cette même société le même devis qui avait été proposé au bailleur le 23 octobre 2017.

 

L’obligation assortie de l’astreinte avait donc été exécutée et il n’est pas démontré que les locataires aient allégué un intérêt légitime à ce que l’obligation soit exécutée par le bailleur lui-même.

 

Il y a donc lieu de liquider l’astreinte uniquement jusqu’à la date de signature du devis par le syndic et ce, peu important que le bailleur ne justifie ni d’une cause étrangère ni de difficultés sérieuses rencontrées dans l’exécution de son obligation.

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