Le défaut d’assurance décennale engage la responsabilité du constructeur

Amandine Roglin
Amandine Roglin

Le constructeur qui n’a pas souscrit de police d’assurance décennale engage sa responsabilité vis-à-vis du maître d’ouvrage et peut donc être condamné à lui verser des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de ce défaut d’assurance.

Cass. 3e civ., 11 mai 2023, n° 22-14749

I –

Un plombier propose à sa nièce, contre une somme de 100.000 €, de lui présenter un terrain permettant l’édification d’une maison.

Le terrain est trouvé, un prêt est consenti et un permis de construire est accordé.

Le plombier se voit mandaté par la nièce pour édifier la maison.

Toutefois, le chantier ne va se dérouler comme prévu.

La propriétaire va en effet d’abord se plaindre d’un surcoût de construction puis, va s’apercevoir que son oncle ne dispose pas d’une assurance décennale et n’a pas souscrit d’assurance dommages-ouvrage.

Elle saisit donc la justice afin d’obtenir réparation de ses préjudices.

II –

Les juges du fond font droit à ses demandes et condamnent le constructeur lequel forme alors un pourvoi en cassation.

Le constructeur considère en effet que les juges du fond auraient dû tenir compte du lien de parenté avec le maître d’ouvrage, lequel savait pertinemment qu’il exerçait une activité de plombier et qu’il n’intervenait pas en tous corps d’état et qu’aucune garantie n’était due du fait de l’effort consenti sur le coût de la construction.

III –

La Cour a rejeté le pourvoi pour les motifs suivants :

« La cour d’appel a relevé à bon droit que le défaut de souscription d’une assurance de responsabilité décennale constituait une faute engageant la responsabilité du constructeur, lequel ne pouvait s’en exonérer qu’en rapportant la preuve qu’il avait mis en garde le maître de l’ouvrage contre les risques encourus.

Elle a retenu, par motifs propres et adoptés, sans être tenue de s’expliquer sur chacun des éléments de preuve soumis à son appréciation, que, d’une part, le fait pour Mme [M] de rechercher des prestations conformes à son budget ne permettait pas d’établir qu’elle avait conscience de l’absence de garantie et que, d’autre part, M. [W] ne démontrait pas l’avoir informée que la diminution du coût de construction était pour partie en lien avec l’absence de garantie décennale couvrant les travaux proposés par son devis ni qu’elle avait connaissance que celui-ci exerçait uniquement une activité de plombier et non de construction tous corps d’état.

M. [W] n’ayant pas soutenu, dans ses conclusions d’appel, l’impossibilité matérielle d’établir un écrit en raison de ses liens de parenté avec le maître de l’ouvrage, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, a pu en déduire, abstraction faite d’un motif surabondant critiqué par la première branche, que celui-ci devait réparer le préjudice résultant de la violation de son obligation.

Puis, ayant retenu que l’absence de souscription d’une assurance obligatoire de responsabilité décennale par l’entrepreneur était constitutive d’un préjudice certain pour le maître de l’ouvrage, qui se trouvait privé, dès l’ouverture du chantier, de la sécurité procurée par l’assurance en prévision des sinistres, la cour d’appel a souverainement fixé le montant du préjudice dont elle venait de constater l’existence.

Elle a, ainsi, légalement justifié sa décision ».

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