Source : Cass.Com, 21 octobre 2020, n°19-13.549
C’est ce que précise la Chambre Commerciale, dans cette décision, inédite, comme suit :
« …
Faits et procédure
1. Selon l’arrêt attaqué (Lyon, 20 décembre 2018), la société […] (la société […]) a souscrit auprès de la société Maxiloc, pour les besoins de son activité professionnelle, un contrat de location d’une pelle, pour une durée de deux mois à compter du 2 septembre 2014.
2. Le 26 septembre 2014, la pelle a été endommagée à la suite d’un accident subi par la société […]. Son assureur, la Smabtp, a indemnisé la société Maxiloc des frais de réparation du matériel loué.
3. La Smabtp ayant en revanche refusé sa garantie au titre de la perte d’exploitation invoquée par la société Maxiloc, celle-ci a assigné la société […] en indemnisation de la perte de loyers subie pendant la période d’immobilisation de la pelle et du préjudice financier complémentaire lié à la nécessité, pendant la même période, de payer les loyers dus en exécution du crédit-bail dont la pelle litigieuse faisait l’objet.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, ci-après annexé
4. En application de l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le second moyen
Enoncé du moyen
5. La société […] fait grief à l’arrêt de la condamner à payer à la société Maxiloc des dommages-intérêts à concurrence des sommes de 10 354,80 euros au titre de la perte de chance de pouvoir donner en location la pelle accidentée et 10 101,83 euros au titre du préjudice financier, alors « qu’en indemnisant la société Maxiloc des loyers payés par celle-ci à son crédit-bailleur, afférents à la période d’immobilisation de la pelle, pour la raison que celle-ci n’avait pas bénéficier pendant cette période de la contrepartie prévue au titre de la location, quand l’indemnisation du préjudice commercial subi pendant cette même période avait déjà réparé le préjudice constitué par la privation temporaire de la pelle litigieuse, la cour d’appel, qui a indemnisé deux fois le même préjudice, a violé l’article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ensemble le principe d’une réparation intégrale du préjudice sans perte ni profit pour la victime. »
Réponse de la Cour
Vu l’article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016, et le principe de réparation intégrale du préjudice, sans perte ni profit pour la victime :
6. En vertu du texte et du principe susvisés, le cocontractant victime d’un dommage ne peut obtenir deux indemnisations distinctes en réparation du même préjudice.
7. Pour allouer à la société Maxiloc la somme de 10 101,83 euros en réparation d’un préjudice financier, l’arrêt, après avoir constaté que la pelle a été accidentée le 26 septembre 2014, pendant la période de location, puis restituée à la société Maxiloc le 9 janvier 2015 après réparation, indemnise, d’abord, à concurrence de la somme de 10 354,80 euros, la perte de chance, pour la société de location, de louer la pelle durant la période d’immobilisation. L’arrêt relève, ensuite, que la pelle a fait l’objet, le 22 avril 2013, d’un contrat de crédit-bail souscrit par la société Maxiloc et en exécution duquel cette dernière devait s’acquitter de quarante-huit loyers mensuels de 3 741,42 euros hors taxe, qu’au cours de la période d’indisponibilité de la pelle, la société Maxiloc a versé à son crédit-bailleur la somme de 10 101,83 euros hors taxe, sans bénéficier de la contrepartie prévue au titre de la location. L’arrêt en déduit que cette somme doit être allouée à la société Maxiloc à titre d’indemnisation complémentaire.
8. En statuant ainsi, alors que le préjudice subi par la société Maxiloc consistait à avoir dû elle-même poursuivre, pendant le temps d’immobilisation de la pelle, le paiement des loyers du crédit-bail portant sur celle-ci, sans avoir pu, pendant le même temps, percevoir de sous-loyers, la cour d’appel, en allouant la somme de 10 101,83 euros en réparation d’un préjudice financier, a indemnisé deux fois le même préjudice et ainsi violé les texte et principe susvisés.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il condamne la société […] à payer à la société Maxiloc la somme de 10 101,83 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice financier, l’arrêt rendu le 20 décembre 2018, entre les parties, par la cour d’appel de Lyon ;… »