Exonération de la plus-value professionnelle : branche complète d’activité et absence d’un salarié nécessaire à l’activité

Coralie MOREAU
Coralie MOREAU - Avocat

SourceCour administrative d’appel de Lyon, 5ème chambre, 10 février 2022, 20LY00016

 

Dans le cadre de la transmission d’une entreprise individuelle ou d’une branche complète d’activité, au titre de l’article 238 quindecies du CGI, les plus-values bénéficient d’une exonération d’impôt, totale ou partielle, en fonction de la valeur des éléments transmis.

 

Comme indiqué lors d’un précédent article, et ce depuis la loi de finances pour 2022[1], cette exonération est totale lorsque la valeur des éléments transmis est inférieure ou égale à 500 000 €, et elle n’est que partielle lorsque cette valeur est comprise entre 500 000 € et 1 000 000 €[2].

 

Auparavant, et notamment lors du litige ci-après exposé, les seuils étaient respectivement de 300 000 € et 500 000 €.

 

En l’espèce, une société ayant pour activité principale celle de débardage de grumes a développé une activité de débardage de billons qui a été cédé quelques années après pour un prix de 105 000 €.

 

L’administration fiscale a remis en cause l’exonération sur la plus-value ci-dessus exposée au motif que la présente cession ne pouvait être qualifiée de branche complète d’activité, la cession portant sur la clientèle et le matériel mais pas sur le personnel.

 

La société a saisi le tribunal administratif qui a rejeté sa demande tenant à la décharge des impositions supplémentaires.

 

Faisant suite à ce rejet, la société a saisi la Cour administrative d’appel en invoquant qu’aucune personne n’exerçait l’activité de débardage de billons à la date de cession et donc aucun personnel ne pouvait être transféré au cessionnaire. De ce fait, la société retient que l’activité pouvait être poursuivie de manière autonome chez le cessionnaire dès lors que la clientèle et le matériel avaient été cédés.

 

Or, la Cour retient qu’un salarié était bien affecté à l’activité transmise mais que celui-ci avait démissionné quelques mois avant la cession et que c’est le salarié de l’activité initiale et principale de débardage de grumes lui-même qui a exercé l’activité de débardage de billons jusqu’à la date de sa cession.

 

De ce fait, la Cour juge que l’activité cédée qui était désormais devenue une activité accessoire et exercée sans personnel dédié ne pouvait faire l’objet d’une exploitation autonome chez la société cédante. Il en résulte que cette activité ne pouvait ainsi constituer une branche complète d’activité et être cédée en bénéficiant de l’exonération de plus-value.

 

Ainsi, il convient de retenir que la plus-value ne peut être exonérée que si l’activité cédée est exercée de façon autonome chez la société cédante et chez la société cessionnaire grâce au transfert des éléments essentiels à l’exercice de l’activité : clientèle, moyens matériels mais aussi humains.

 

En l’occurrence, l’activité transférée ayant besoin d’un salarié qualifié et n’en disposant plus au moment de la cession ne pouvait être considérée comme faisant l’objet d’une exploitation autonome chez la société cédante et a fortiori chez la société cessionnaire.

 

Toutefois, notons que dans certains cas, bien qu’aucun salarié ne soit transféré, une branche d’activité peut être considérée comme une exploitation autonome et être cédée en bénéficiant de l’exonération de plus-value, dès lors que l’activité ne nécessitait pas de moyens humains autre que le gérant[3].

 

[1] Loi de finances n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022 – Article 19

 

[2] Article Chronos –  Loi de finances 2022 : aménagement des dispositifs relatifs aux cessions d’entreprise

 

[3] CAA Bordeaux, 19 octobre 2021, n° 19BX04882

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