Du bon usage du droit d’alerte

Patricia VIANE CAUVAIN
Patricia VIANE CAUVAIN - Avocat

Source : Cassation Sociale, 14 octobre 2020, n°19-11.508

 

L’article L2313-2 du Code du Travail dans sa rédaction alors applicable prévoyait que si un délégué du personnel constate, notamment par l’intermédiaire d’un salarié, qu’il existe une atteinte aux droits des personnes, à leur santé physique et mentale ou aux libertés individuelles dans l’entreprise qui ne serait pas justifiée par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnée au but recherché, il en saisit immédiatement l’employeur.

 

L’atteinte peut résulter d’un harcèlement sexuel ou moral, ou de toute mesure discriminatoire en matière d’embauche, de rémunération…

 

Il était prévu dans cette hypothèse que l’employeur procède sans délai à une enquête avec le délégué et prend les dispositions nécessaires pour remédier à la situation.

 

En cas de carence de l’employeur, le Conseil des Prud’hommes peut être saisi.

 

Ces dispositions ont été reprises par l’article L2312-59 du Code du Travail applicable qui vise les membres de la délégation du personnel au Comité Social et Economique

 

Ce droit d’alerte a été exercé en l’espèce par un délégué du personnel motif pris d’un litige opposant l’entreprise et deux de ses salariés portant sur le mode de calcul de l’indemnité compensatrice de congés payés des salariés intérimaires.

 

Le délégué du personnel avait demandé à l’entreprise la réalisation d’une enquête conjointe portant sur les modalités de calcul de cette indemnité et s’était vu opposer le refus de celle-ci.

 

Le délégué du personnel et le syndicat national de travail temporaire CFTC qui s’associe à la procédure sollicitent devant la Juridiction Prud’homale qu’il soit enjoint à l’employeur de rechercher toutes les paies des salariés intérimaires pour lesquelles l’indemnité de congés payés doit être régularisée.

 

Ils demandent qu’il soit dit et jugé que le calcul de l’indemnité de congés payés des salariés intérimaires en mission doit s’effectuer conformément aux dispositions de l’article L1251-19 du Code du Travail

 

Ils sont déboutés de leurs demandes par les premiers juges.

 

Ils forment un pourvoi, estimant qu’il suffit qu’une atteinte aux droits de la personne et aux libertés individuelles soit caractérisée pour une catégorie de salariés, pour que l’exercice du droit d’alerte soit fondé et que ce droit d’alerte s’exerce en cas de carence de l’employeur ou de divergence sur la réalité de l’atteinte aux droits des personnes, à la santé physique et mentale, aux libertés individuelles…

 

De fait, le salarié et la CFTC considéraient que les salariés concernés subissaient une inégalité de traitement et que la violation de la législation sur les congés payés des intérimaires constituait une atteinte au droit au repos et à la santé des travailleurs.

 

La Cour de Cassation relève que la Cour d’Appel saisie de l’exercice d’un droit d’alerte fondé sur le mode de calcul des indemnités compensatrices de congés payés des salariés intérimaires, a considéré à juste titre que la demande n’entre pas dans les prévisions de l’article L2313-2 du Code du Travail.

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