Déclaration notariée d’insaisissabilité et reprise du droit des poursuites du créancier après clôture pour insuffisance d’actif

Jacques-Eric MARTINOT
Jacques-Eric MARTINOT - Avocat

 

Source :Cass.com., 13 décembre 2007, n° 15-28357, n° 1465 P + B

 

Un entrepreneur est mis en liquidation judiciaire qui verra sa procédure clôturée pour insuffisance d’actif.

 

Antérieurement à la procédure collective, l’entrepreneur avait fait publier une déclaration d’insaisissabilité, opposable donc à la procédure collective qui allait s’ouvrir, mais inopposable à la Banque, le prêt ayant été octroyé avant.

 

Comme l’on peut s’en douter à ce stade de l’article, la Banque ne sera pas payée de sa créance déclarée et admise à la procédure.

 

Elle sollicitera alors du Président du tribunal l’autorisation de reprendre les poursuites contre son débiteur et plus précisément à l’encontre du bien frappé d’insaisissabilité, inopposable à la Banque.

 

En réalité, la Banque se fonde sur l’article L643-11 du Code de commerce précisant :

 

« I.- Le jugement de clôture de liquidation judiciaire pour insuffisance d’actif ne fait pas recouvrer aux créanciers l’exercice individuel de leurs actions contre le débiteur. Il est fait exception à cette règle :

 

1° Pour les actions portant sur des biens acquis au titre d’une succession ouverte pendant la procédure de liquidation judiciaire ;

 

2° Lorsque la créance trouve son origine dans une infraction pour laquelle la culpabilité du débiteur a été établie ou lorsqu’elle porte sur des droits attachés à la personne du créancier ; »

 

La Cour d’appel écartera la demande de la Banque relevant que la créance de la Banque ne relève pas de la catégorie des droits attachés à la personne.

 

Un pourvoi est alors formé.

 

Dans son pourvoi, la banque fait valoir que le droit de saisir l’immeuble, en raison de l’inopposabilité à son égard de la déclaration d’insaisissabilité est un droit qui lui est propre, attaché à sa personne, et l’autorise donc à reprendre l’exercice de son droit de poursuite.

 

La Cour de cassation rejettera le pourvoi formé et précisera que « Mais attendu que si l’article L. 643-11, I, 2°, du code de commerce, dont la banque revendique exclusivement l’application, autorise un créancier, dont les opérations de la liquidation judiciaire de son débiteur n’ont pas, en raison de l’insuffisance d’actif, permis de régler la créance, à recouvrer l’exercice individuel de son action contre lui, c’est à la condition que la créance porte sur des droits attachés à la personne du créancier ; qu’ayant exactement énoncé que n’entre pas dans cette catégorie le droit d’un créancier de saisir un immeuble objet d’une déclaration d’insaisissabilité qui lui est inopposable, la cour d’appel n’avait pas à effectuer la recherche inopérante invoquée par le moyen ; que celui-ci n’est pas fondé ; »

 

La solution de la Cour rappelle un point essentiel. La banque aurait dû exercer son droit de poursuite sur le bien en marge de la procédure collective, indépendamment de ses droits dans la procédure collective.

 

Autrement dit, la DNI interdit au liquidateur de faire procéder à la vente du bien immobilier, mais n’interdit pas au créancier, à qui la DNI est inopposable de prendre toutes mesures sur le bien afin de recouvrer sa créance.

 

Pour aller plus loin, la Cour de cassation a jugé qu’un créancier dont la DNI ne lui est pas opposable doit exercer son droit de poursuite après avoir obtenu un titre exécutoire fondée sur une action à l’encontre du débiteur constatant l’existence, le montant et l’exigibilité de la créance.[1]

 

Jacques-Eric MARTINOT

Vivaldi Avocats.


[1] Cass.com., 13 septembre 2017, n° 16-10206

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