Dans un arrêt du 28 octobre 2025, la chambre criminelle de la Cour de cassation consacre la possibilité pour une personne morale condamnée à une peine en raison d’atteinte à l’intégrité des personnes de voir sa condamnation assortie d’une obligation d’affichage de la décision à son siège social ainsi que de la diffuser sur son site Internet : affichage et diffusion sont cumulatifs.
Source : 28 octobre 2025, Cour de cassation, n° 24-86.438
I –
Pour des faits commis le 2 mai 2017, une société a été déclarée coupable de blessures involontaires par violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement ayant occasionné une incapacité totale de travail d’une durée inférieure ou égale à trois mois. Elle en a été condamnée, notamment, à l’affichage de la décision pendant une durée de deux mois à son siège social et sur son site internet.
Elle relève appel de la décision, tout comme le ministère public.
L’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 6 septembre 2024 confirme cette peine d’affichage de la décision au siège social ainsi que sur son site Internet.
II –
La question qui se pose ici, et qui fonde le pourvoi, concerne le caractère cumulatif de l’affichage de la décision au siège social ainsi que sur le site Internet : la société peut-elle être condamnée à l’affichage de la décision à la fois sur son site Internet et à son siège ?
La cour d’appel rend son arrêt au visa de l’article 222-21 du Code pénal relatif aux sanctions applicables aux personnes morales responsables d’atteintes involontaires à l’intégrité des personnes, cet article effectue un renvoi à l’article 131-39 du même code. Cet article prévoit notamment le caractère alternatif de la peine d’affichage citée supra :
« […] 9° L’affichage de la décision prononcée ou la diffusion de celle-ci soit par la presse écrite, soit par tout moyen de communication au public par voie électronique […] ».
La Cour de cassation va pourtant rejeter le pourvoi.
III –
La Cour de cassation consacre le caractère cumulatif : l’affichage de la décision au siège de la société et sur son site internet pour une durée de deux mois est tout à fait possible.
Pour pouvoir confirmer l’arrêt d’appel et rejeter le pourvoi, la Haute Cour va tout d’abord citer l’article 131-38 du Code pénal qui concerne pourtant la sanction d’amende, qui s’applique bien aux personnes morales, puis précise que la peine d’affichage de la décision est prononcée dans les conditions de l’article 131-35 du même code.
Il est ici légitime de penser qu’une coquille s’est glissée dans l’arrêt de la Cour de cassation : c’est l’article 131-48 (et non 131-38) du Code pénal qui renvoie à l’article 131-35 concernant les conditions dans lesquelles est prononcée, toujours pour les personnes morales, « la peine d’affichage de la décision ou de diffusion ».
Or l’article 131-35 dispose : « L’affichage et la diffusion peuvent être ordonnés cumulativement ».
En d’autres termes, si l’article qui prévoit les modalités d’application de certaines peines applicables aux personnes morals semble, par sa rédaction, prévoir le caractère alternatif entre la peine d’affichage de la décision et sa diffusion, le renvoi concernant les conditions du prononcé de ladite peine qu’opère ce même article permet le caractère cumulatif de l’affichage de la décision et sa diffusion, sur un site Internet par exemple.
L’arrêt souligne que l’article 131-35 du Code de pénal doit être pris dans sa rédaction issue de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011, précision importante car la rédaction de la version antérieure de cet article ne comportait pas la possibilité d’un affichage et d’une diffusion simultanée de la décision. Cet état de fait n’avait pourtant pas empêcher la Cour de cassation de refuser le caractère cumulatif de la diffusion et de l’affichage dans un arrêt postérieur à la nouvelle version de l’article 131-35 du Code pénal[1].
En définitive, toute personne morale condamnée à une peine en raison d’atteintes involontaires à l’intégrité des personnes peut également être condamnée à afficher la décision à son siège social ainsi qu’à la diffuser sur son site Internet.
[1] Cour de cassation, Ch. Crim., 23 juin 2015, 14-80.213
 
					 
							
 
			














 
			 
                     
                                
                              
		
 
		
 
		