Date d’effet du congé délivré pour l’expiration d’une période triennale du bail

Sylvain VERBRUGGHE
Sylvain VERBRUGGHE

 

 

SOURCE : 3ème civ, 3 juillet 2013, n°12-17914, FS – P+B

 

Aux termes de l’article L145-4 du Code de commerce, « à défaut de convention contraire, le preneur a la faculté de donner congé à l’expiration d’une période triennale, dans les formes et délais de l’article L145-9 du code de commerce », c’est-à-dire par acte extrajudiciaire en respectant un préavis de 6 mois minimum.

 

L’article L145-9 dudit code prévoyant également depuis la loi dite LME du 4 aout 2008, que le congé devait être donné pour le dernier jour du trimestre civil, date qui ne correspondait presque jamais avec celle de fin de période triennale, la question se posait de la date pour laquelle pour laquelle congé devait être donné. Pour le Tribunal de Grande Instance de Paris, il s’agissait de la date anniversaire du bail[1].

 

En l’espèce, le preneur avait adopté l’autre position, et estimait que le congé devait être signifié pour le dernier jour du trimestre civil suivant la date anniversaire du bail. Il a ainsi signifié congé triennal le 31 aout 2009 pour le 31 mars suivant, alors que la date anniversaire du bail était le 28 février. Le bailleur a soutenu que ce congé n’était pas valablement délivré et ne pouvait prendre effet au 31 mars 2010 : conformément à la jurisprudence, les effets du congé devaient être reportés à la prochaine échéance triennale[2].

 

La Cour d’appel de Douai adopte la position retenue par les tribunaux parisiens, et relève que le congé devait être délivré pour la date anniversaire du bail. Cependant, elle constate que congé traduisait de façon certaine et sans équivoque la volonté du preneur de délivrer congé pour une période triennale, ce que le bailleur n’ignorait pas. Aussi, après avoir vérifié que le délai de 6 mois était respecté, la Cour en déduit que le congé devait produire effet à la date à laquelle il aurait du produire effet, c’est-à-dire à la date anniversaire du bail, le 28 février 2010.

 

La Cour de cassation entérine la position de la Cour d’appel, énonçant que le congé en période triennal doit être donné pour la date anniversaire du bail uniquement. La Haute juridiction considère que les nouvelles dispositions de l’article L145-9 du Code de commerce ne s’appliquent qu’aux congés donnés au cours de la tacite prolongation du bail.

 

La Haute juridiction approuve tout autant la décision des juges douaisiens visant à donner faire produire un effet anticipé au congé donné pour une date erronée. En d’autres termes, peu importe la date, inscrite dans l’acte d’huissier, pour laquelle le congé est délivré : les juridictions peuvent se réserver la possibilité de la rectifier si elles témoignent de façon claire et sans équivoque de l’intention du preneur de délivrer congé pour la période triennale.

 

Enfin, le bailleur avait aussi tenté de remettre en cause le système de computation des délais adoptée par la jurisprudence, soutenant qu’en délivrant congé le 31 aout 2009 pour le 28 février 2010, le preneur ne respectait pas, en tout état de cause, le délai de 6 mois.

 

Conformément à sa jurisprudence[3], la Cour de cassation approuve de nouveau la Cour d’appel, qui a considéré que le délai étant exprimé en mois, il expire le dernier jour du mois qui porte le même quantième que le jour de l’acte : en l’occurrence, le dernier jour du mois de février.

 

Arrêt de rejet, cette décision n’en demeure pas moins riche en enseignements.

 

Sylvain VERBRUGGHE

Vivaldi-Avocats


[1] TGI Paris, CH18 S2, 28 janvier 2010, AJDI 2010 p133 ; TGI Paris CH18 S2, 17 juin 2010, AJDI 2010 p636

[2] Com, 25 janvier 1961, Publié au Bulletin n°51, Ann Loy 1961-678

[3] 3ème civ, 13 janvier 2004, n°02-18337

 

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