Conséquences fiscales du versement de la prestation compensatoire en capital et sous forme de rente sur une période inférieure à 12 mois déclarées inconstitutionnelles

Caroline DEVE
Caroline DEVE - Avocat

SOURCE : CConst 31/01/2020 n°2019-824 QPC

 

L’article 270 du code civil prévoit que, lors d’un divorce, l’un des époux peut être tenu de verser à l’autre une prestation compensatoire destinée à compenser, autant qu’il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives.

 

Par principe la prestation compensatoire est versée sous forme de capital mais elle peut, selon les circonstance du divorce, être versée totalement ou partiellement sous forme de rente.

 

En vertu de l’article 199 octodecies du CGI, le versement d’une prestation compensatoire ouvre droit à réduction d’impôt pour l’époux débiteur sauf lorsque la prestation compensatoire est versée pour partie sous forme de rente. L’article 156 du même code prévoit néanmoins que les versements sur une période de plus de 12 mois même assortis d’une rente ouvrent droit à réduction d’impôt.

 

Un contribuable a sollicité la saisine du Conseil Constitutionnel pour voir déclarer inconstitutionnelles les dispositions de l’article 199 octodecies du CGI aboutissant à exclure du champ d’application de la réduction d’impôt le versement d’une prestation compensatoire assortie d’une rente sur une période inférieure à 12 mois au motif que cette différence de traitement n’est pas fondée sur des critères objectifs et rationnels en rapport avec l’objet de la loi.

 

La question prioritaire de constitutionnalité a été jugée sérieuse de sorte que le Conseil Constitutionnel a pu statuer sur la question.

 

Il constate tout d’abord que les dispositions législatives en vigueur prévoient effectivement un avantage fiscal pour l’ensemble des modalités de versement de la prestation compensatoire sauf pour le versement en capital effectué sur une période inférieure à 12 mois et assortie d’une rente.

 

Il ressort des travaux préparatoires de la loi du 29 décembre 2001 à l’origine de la disposition contestée que cette exception a été prévue par le législateur pour prévenir certaines pratiques d’optimisation fiscale. Le législateur voulait empêcher tout débiteur de limiter le versement de la prestation compensatoire en capital au plafond de la réduction d’impôt (30 500 €) afin de profiter en outre de la réduction d’impôt sur le surplus versé sous forme de rente pendant 12 mois au plus.

 

Le Conseil Constitutionnel juge que, ce faisant, le législateur ne s’est pas fondé sur des critères objectifs et rationnels en rapport avec l’objet de la loi.

 

En effet, il estime en effet que « le simple fait qu’un versement en capital dans un délai de douze mois s’accompagne d’une rente ne saurait suffire à identifier une stratégie d’optimisation fiscale dès lors que les modalités de versement d’une prestation compensatoire, qui dépendent de la situation financière des époux, sont soit déterminées par le juge en fonction de l’âge ou de l’état de santé du créancier, soit homologuées par lui en fonction du caractère équitable des droits et obligations des époux ».

 

Par conséquent, le Conseil Constitutionnel juge que le paragraphe II de l’article 199 octodecies du CGI méconnaît le principe d’égalité devant les charges publiques et le déclare donc contraire à la Constitution.

 

Suite à cette décision, les dispositions en cause ne sont plus en vigueur à compter de la publication de la décision commentée.

 

Par ailleurs, la déclaration d’inconstitutionnalité peut être invoquées dans toutes les instances en cours et non jugées définitivement.

 

Enfin, les contribuables se trouvant dans la situation visée par la déclaration d’inconstitutionnalité peuvent, par réclamation, demander l’application de la réduction d’impôt pour les années non prescrites ayant fait l’objet d’une déclaration d’impôt c’est-à-dire en l’espèce les années 2017 (réclamation à introduire au plus tard le 31/12/2020) et 2018 (réclamation à introduire au plus tard le 31/12/2021) et à compter de l’imposition des revenus 2019 solliciter la réduction d’impôt à hauteur des versements effectués.

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