Management package : les ABSA peuvent constituer un investissement financier

Clara DUBRULLE
Clara DUBRULLE

Source : CAA PARIS, 11 février 2020, n° 18PA03132

 

Les management package sont divers : stock-options, bons de souscription d’actions, bons de souscription de parts de créateur d’entreprise, actions gratuites… Ils poursuivent tous un objectif d’alignement des intérêts de l’entreprise et de ses cadres et dirigeants sur le principe d’un intéressement de ces cadres et dirigeants au capital de l’entreprise.

 

En pratique, les management package visent à associer les cadres et dirigeants au risque financier supportés par les investisseurs ou acheteurs de l’entreprise, par l’attribution d’une option d’achat d’actions, à un prix déterminé, option qu’ils pourront lever ultérieurement pour acquérir les actions, le plus souvent, juste avant de les céder.

 

Dans cette hypothèse, le gain est double :

 

  Une plus-value d’acquisition égale à la différence entre le prix de souscription de l’option d’achat et la valeur de l’action au jour de la levée d’option ;

 

  Une plus-value de cession égale à la différence entre le prix de cession et la valeur de l’action au jour de la levée d’option. En générale, la levée d’option et la cession des actions étant faites sur un court laps de temps, le gain est principalement (voir totalement) constitué par la plus-value d’acquisition.

 

La plus-value d’acquisition est ensuite imposée par les bénéficiaires dans la catégorie des plus-values sur valeurs mobilières.

 

Toutefois, lorsqu’un dirigeant salarié ou toute autre personne en relation d’affaires avec un groupe de sociétés bénéficie d’options de souscription ou d’achat d’actions en dehors du dispositif légal, ou se voit offrir la possibilité d’acheter ou/et de revendre dans des conditions préférentielles des titres d’une société, l’administration se réserve le droit de requalifier le gain réalisé à cette occasion et de le taxer non pas dans la catégorie des plus-values sur valeurs mobilières mais dans celle correspondant effectivement à la nature de l’opération réalisée.

 

Le gain est ainsi susceptible d’être taxé au barème progressif de l’impôt sur le revenu :

 

  Dans la catégorie des traitements et salaires (ou article 62 du CGI) si la prestation rendue en contrepartie de l’offre des titres peut être rattachée à l’exécution d’un contrat de travail ou à l’exercice de fonctions dirigeantes dont la rémunération est imposable dans la catégorie des traitements et salaires (ou dans celle de l’article 62 du CGI) ;

 

  Dans la catégorie des bénéfices non commerciaux lorsque l’avantage a pour contrepartie une activité déployée à titre personnel (opérations d’entremise ou de négociation dans le cadre de la restructuration du groupe : prise de participation, désengagement d’une filiale, etc.) ;

 

  En tant que revenu distribué si l’avantage consenti est occulte, ou résulte d’un acte de gestion anormal de la société, ou a pour effet de porter la rémunération totale du bénéficiaire à un montant exagéré.

 

Pour écarter la requalification des gains, il convient de démontrer à l’administration fiscale que l’acquisition des titres présente le caractère d’une opération capitalistique, ce qui suppose la prise d’un risque financier par le bénéficiaire des managements package. Si un tel risque existe, le gain tiré de l’opération est bien une plus-value sur valeurs mobilières.

 

En l’espèce, dans l’affaire présentée à la Cour administrative d’appel de Paris, des actions à bons de souscription (ABSA) avaient été attribuées à la société des dirigeants.

 

Il était prévu que ces bons permettraient de souscrire des actions nouvelles dans le groupe hôtelier à leur valeur nominale, leur exercice étant toutefois subordonné à un changement d’actionnaire majoritaire du groupe hôtelier ou à son introduction en bourse. En outre, le nombre d’actions nouvelles du groupe hôtelier susceptibles d’être ainsi souscrites serait fonction, d’une part, de l’année de sortie de l’investissement, c’est-à-dire de la cession globale et définitive du groupe hôtelier, et, d’autre part, de la rentabilité de l’opération d’achat-revente du groupe hôtelier.

 

Lors du rachat du groupe hôtelier par un fonds d’investissement américain, la société des dirigeants a pu exercer l’intégralité des bons de souscription d’actions attachés aux actions du groupe hôtelier qu’elle détenait. Cette opération a permis un enrichissement de ses actionnaires (les dirigeants) dont M. C qui a réalisé un gain net de 4 773 649 € en cédant les titres de la société des dirigeants qu’il détenait au fonds d’investissement américain.

 

L’administration fiscale considère qu’une partie de la plus-value dégagée par M. C doit être imposée dans la catégorie des traitements et salaires en tant qu’avantage en argent constitutif d’un complément de rémunération.

 

La Cour relève que l’opération de LBO à laquelle les dirigeants ont été associés était susceptible d’aboutir sans satisfaire les espérances de gains des investisseurs et que les dirigeants risquaient de perdre jusqu’à 67% de leur investissement. En outre, la Cour souligne que l’administration fiscale n’a pas invoqué de condition préférentielle dont aurait bénéficié M. C.

 

Il en résulte que les ABSA constituent un investissement financier.

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