Conséquence de l’annulation de la convention de forfait jour sur la rémunération du salarié protégé.

Christine MARTIN
Christine MARTIN - Avocat associée

 

SOURCE : Arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de Cassation du 13 septembre 2017, n° 15-24.397 (FP-P+B).

 

Un salarié avait été embauché par la Société ALDI MARCHE le 17 décembre 1993 et occupait au dernier état de ses fonctions, depuis le 1er janvier 2002, des fonctions de responsable de magasin, statut cadre, coefficient 7 de la convention collective du commerce de gros et de détail à prédominance alimentaire.

 

En application de l’article 5-7.3 de la convention collective, le salarié était soumis à un forfait annuel de 1920 heures correspondant à un temps de travail effectif hebdomadaire moyen de 42 heures, augmenté de 5% de temps de pose rémunéré.

 

Suite à un Arrêt de la Cour de Cassation du 23 mai 2006, et des Arrêts de la Cour d’Appel de DIJON et de la Cour d’Appel de DOUAI, annulant la clause conventionnelle de forfait annuel en heures appliquée par la Société ALDI, celle-ci a décidé d’appliquer la durée du travail de 35 heures hebdomadaires à ses responsables de magasins.

 

C’est ainsi que par un courrier du 30 mars 2012, l’employeur proposait au salarié de choisir entre :

 

– Un contrat avec un forfait jours de 215 jours sur l’année pour une rémunération inchangée de 3 026,39 €,

 

– Un contrat appliquant la durée légale du travail, soit 35 heures hebdomadaires répartis sur 3,5 jours de travail avec une rémunération calculée sur la base du salaire horaire en vigueur, soit 2 522,04 €.

 

Le salarié n’ayant pas opté pour l’une des deux propositions faites par son employeur, la société lui renvoyait un nouveau courrier afin de l’enjoindre de signer une convention de forfait en jours, lui permettant de maintenir sa rémunération actuelle et indiquant qu’à défaut de signer cette convention de forfait en jour, le contrat de travail du salarié se trouverait automatiquement réduit à la durée légale du travail.

 

Le salarié ayant refusé d’opter pour un forfait jours, il s’est vu appliquer la durée légale du travail, soit 35 heures hebdomadaires à compter du mois de juin 2012, ce qui a entraîné une baisse de sa rémunération de l’ordre de 600 à 800 € selon les mois.

 

Le salarié était à l’époque délégué du personnel et représentant syndical auprès du Comité d’Entreprise. Il était, en dernier lieu, délégué syndical et représentant syndical au Comité d’Entreprise, il avait donc le statut de salarié protégé.

 

Au motif de la modification unilatérale de son contrat de travail entraînant une baisse de ses salaires, le salarié a saisi le Conseil des Prud’hommes d’AVIGNON, lequel l’a intégralement débouté de l’ensemble de ses demandes.

 

En cause d’appel, cette affaire revient par-devant la Cour d’Appel de NIMES, laquelle, dans un Arrêt du 30 juin 2015, va considérer que c’était à bon droit que l’employeur avait réintégré le salarié dans un dispositif légal de 35 heures par semaine, ce dernier étant en droit de solliciter le paiement des heures supplémentaires éventuellement accomplies. Le retour au droit commun par l’effet de la disparition pour cause de nullité de la disposition conventionnelle jusqu’alors appliquée ne requérant pas l’assentiment du salarié.

 

La Cour d’Appel va également préciser que le salarié ne pouvait prétendre se voir appliquer un aspect de la modification de son contrat de travail (durée du travail diminuée de 7 heures par semaine) et refusait l’autre (diminution corrélative de la rémunération) et elle va préciser que c’est à bon droit que cette baisse de rémunération s’impose au regard de l’égalité entre salariés.

 

Par suite la Cour d’Appel va confirmer en toutes ses dispositions la décision des Premiers Juges.

 

Ensuite de cette décision, le salarié forme un pourvoi en Cassation.

 

Bien en lui en prit, puisqu’au visa des articles L. 2411-1, L. 2411-3 et L. 2411-8 du Code du Travail, énonçant que le salarié qui avait refusé la modification de son contrat de travail était un salarié protégé, la Cour d’Appel devait déduire de ce refus l’obligation pour l’employeur, soit de maintenir le montant de la rémunération, soit de saisir l’Inspecteur du Travail d’une demande d’autorisation administrative de licenciement, de sorte qu’en statuant comme elle l’a fait, la Cour d’Appel a violé les textes susvisés.

 

Par suite, la Chambre Sociale casse et annule l’Arrêt d’appel en toutes ses dispositions.

 

Christine MARTIN

Associée

Vivaldi-Avocats

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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