Source : Cass. com., 4 juillet 2018, n°17-16.056, F-P+B
I – Les faits
En l’espèce une commerçante a été radiée du registre du commerce et des sociétés le 14 avril 2014. Elle est assignée ensuite par le Trésor Public, pour non-paiement d’une dette de TVA au titre de l’année 2013, et finalement mise en liquidation judiciaire le 28 avril 2015, la cessation des paiements étant fixée au 31 mars précédent. La décision est confirmée en appel, la débitrice formant alors un pourvoi en cassation.
II – L’arrêt de rejet
La débitrice soutenait que la liquidation judiciaire ne pouvant être prononcée qu’à l’égard d’un débiteur en cessation des paiements, lorsque cette procédure est ouverte après la cessation de l’activité professionnelle, le passif doit en outre provenir de cette activité. Dès lors, la liquidation ne peut être ouverte après la cessation de l’activité qu’à la condition que la cessation des paiements soit antérieure.
Ainsi, selon la débitrice, en ouvrant néanmoins une procédure de liquidation judiciaire à son encontre, alors qu’elle avait été radiée du RCS le 14 avril 2014, après avoir fixé la date de cessation de ses paiements au 31 mars 2015, les juges du fond avaient violé les règles élémentaires d’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire.
La Cour de cassation ne suit pas ce raisonnement, et conforte les juges du fons par un arrêt de rejet.
III – Un critère à retenir : un passif résiduel exigible à caractère professionnel auquel l’ancien commerçant est dans l’impossibilité de faire face avec son actif disponible
Après la promulgation de la loi de sauvegarde des entreprises en 2005, et la suppression du critère d’inscription du débiteur à un registre professionnel pour bénéficier d’une procédure collective, des interrogations s’étaient posées à ce sujet.
Avant 2005, tant la personne physique non immatriculée au registre, même s’il s’agissait du gérant (ou d’un associé) d’une société créée de fait pour exploiter un fonds de commerce, que le commerçant radié du registre du commerce ne pouvait demander lui-même sa mise en redressement judiciaire en déclarant l’état de cessation des paiements. Aujourd’hui l’article L.620-2 du Code de commerce ne fait plus référence à la notion d’immatriculation à un quelconque registre.
La Cour de cassation avait été saisi d’un avis, rendu le 17 septembre 2007 lequel précisait que, à compter du 1er janvier 2006, une procédure collective de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire pouvait être ouverte, sur le fondement de la loi du 26 juillet 2005, à la demande d’un professionnel ayant cessé son activité et qui n’était pas déjà soumis à une procédure collective, dès lors qu’il se trouvait en état de cessation des paiements et que tout ou partie de son passif provenait de son activité professionnelle, peu important la date à laquelle il avait cessé son activité[1].
Elle en fera application par la suite, en refusant à un débiteur le bénéfice du surendettement des particuliers dont le passif était constitué pour partie de dettes professionnelles nées à l’occasion d’une activité commerciale précédemment exercée, peu important la date à laquelle il avait été radié du registre du commerce et des sociétés [2].
La Cour de cassation a posé toutefois un délai butoir au créancier pour assigner le débiteur en redressement judiciaire : un an à compter de la radiation du RCS. La Haute juridiction a en effet estimé que « le tribunal peut ouvrir à l’égard de l’avocat qui a cessé d’exercer son activité à titre individuel pour devenir associé d’une société civile professionnelle (ou d’une société d’exercice libéral) une procédure de redressement judiciaire après cette cessation d’activité, lorsque tout ou partie du passif provient de l’activité professionnelle antérieure; toutefois, si la procédure est ouverte sur l’assignation d’un créancier, cette dernière doit intervenir dans le délai d’un an à compter de la cessation de l’activité individuelle »[3].
Thomas LAILLER
Vivaldi-Avocats
[1] Cass. avis, 17 sept. 2007,
[2] Cass. civ. 1ère, 9 juill. 2009, n°08-17.211
[3] Cass. com. 9 févr. 2010, n°08-17.670