La Commission Européenne impose la déclaration de certains dispositifs transfrontières

Clara DUBRULLE
Clara DUBRULLE

 

SOURCE : 2018/822 du Conseil du 25 mai 2018 modifiant la directive 2011/16/UE en ce qui concerne l’échange automatique et obligatoire d’informations dans le domaine fiscal en rapport avec les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration

 

La directive 2018/822 vise à renforcer la transparence fiscale afin de lutter contre la planification fiscale agressive. Applicable aux particuliers et aux entreprises, cette nouvelle directive prévoit la déclaration aux autorités fiscales des opérations transfrontières comportant certaines caractéristiques ou marqueurs indicateurs de pratiques de planification fiscale agressive.

 

La directive poursuit bien évidemment un objectif dissuasif mais elle permet également aux Etats membres d’identifier plus rapidement les opérations de planification qui les concernent afin de leur permettre d’y faire échec par l’adoption de réponses législatives ou réglementaires adaptées.

 

La directive prend soin de préciser que l’absence de réaction d’une administration fiscale face à un dispositif devant faire l’objet d’une déclaration ne vaut absolument pas approbation de la validité ou du traitement fiscal de ce dispositif.

 

La directive modifie et complète donc la directive 2011/16 du 15 février 2011 relative à l’échange automatique d’informations dans le domaine fiscal et introduit un mécanisme en deux temps :

 

– La déclaration de certaines opérations ou dispositifs transfrontières, lorsque ces opérations comportent certaines caractéristiques ou marqueurs ;

 

– L’échange automatique entre les Etats membres des informations ainsi obtenues.

 

Qu’est-ce qu’un dispositif transfrontière ?

 

La directive ne définit pas la notion de « dispositif ». Toutefois, nous savons que ne devront être déclarés que les dispositifs présentant un caractère transfrontière c’est-à-dire concernant soit plusieurs Etats membres, soit un Etat membre et un pays tiers.

 

L’obligation de déclaration est déclenchée par la présence d’un ou plusieurs marqueurs recensés à l’annexe IV de la directive.

 

Ces marqueurs sont présentés comme les indicateurs d’un risque potentiel d’évasion fiscale.

 

Qui doit déclarer ?

 

L’obligation de déclaration revient en principe à l’intermédiaire lorsque ce dernier réside fiscalement dans l’UE, y dispose d’un établissement stable ou s’il répond à certains autres critères de rattachement à l’UE. La notion d’intermédiaire vise essentiellement les conseillers financiers et les conseils fiscaux, elle est cependant définie de manière très large par la directive comme :

 

« Toute personne qui conçoit, commercialise ou organise un dispositif transfrontière devant faire l’objet d’une déclaration, le met à disposition aux fins de sa mise en œuvre ou en gère la mise en œuvre ».

 

Il en résulte que toute personne amenée à apporter des conseils à un contribuable, y compris sur certains aspects spécifiques et limités d’une opération internationale, peut se trouver qualifiée d’intermédiaire et être tenue en cette qualité de déclarer l’opération aux autorités fiscales de son Etat membre de résidence, dès lors que ses compétences et son expertise lui permettent d’appréhender que cette opération entre dans le champ d’application de la directive, quand bien même le conseil aurait porté sur des aspects autres que fiscaux.

 

En présence de plusieurs intermédiaires, tous sont tenus de déclarer.

 

Toutefois, en pratique, l’obligation de déclaration est susceptible de se heurter au secret professionnel lorsque l’intermédiaire y est soumis. Dans ce cas, la directive prévoit la possibilité pour les Etats membres de dispenser l’intermédiaire de l’obligation déclarative, à charge pour ce dernier de notifier l’obligation de déclaration à tout autre intermédiaire (non soumis au secret professionnel) et, en l’absence d’un autre intermédiaire, au contribuable concerné.

 

En France, l’obligation de déclaration pourrait donc fréquemment revenir au contribuable notamment lorsque ce dernier a recours aux services d’un avocat fiscaliste.

 

Quels sont les modalités et le contenu de la déclaration ?

 

La déclaration devra comporter les informations prévues par la directive à savoir notamment : l’identification des intermédiaires et du contribuable concerné, leur résidence fiscale, des informations détaillées sur les marqueurs, un résumé du contenu du dispositif, la date de sa mise en œuvre …

 

Le lieu de déclaration est déterminé prioritairement par la résidence fiscale du déclarant.

 

Ces dispositions s’appliquent à compter du 1er juillet 2020, date d’application prévue par la directive, avec un volet rétrospectif :

 

– Les dispositifs transfrontières dont la première étape de mise en œuvre sera intervenue à compter de l’entrée en vigueur de la directive c’est-à-dire à compter du 25 juin 2018, devront être déclarées entre le 1er juillet 2020 et le 31 août 2020 ;

 

– Et à compter du 1er juillet 2020, la déclaration devra être déposée dans un délai de 30 jours débutant à la première des dates suivantes : le lendemain de la mise à disposition du dispositif en vue de sa mise en œuvre, le lendemain du jour où le dispositif est prêt à être mis en œuvre, ou encore lorsque la première étape de mise en œuvre a été accomplie.

 

Les informations déclarées seront ensuite échangées entre les Etats membres dans un délai d’un mois à compter de la fin de chaque trimestre.

 

Aux termes de la directive, l’adoption de sanctions « efficaces, proportionnées et dissuasives » relatives à l’application du dispositif revient aux Etats membres.

 

Le caractère rétrospectif de l’obligation déclarative prévu par la directive doit conduire les intermédiaires et les contribuables à recenser dès maintenant leurs opérations internationales dont la première étape de mise en œuvre doit intervenir à compter du 25 juin 2018.

 

Ces opérations devront ensuite être examinées au regard des marqueurs définis par l’annexe IV de la directive afin de déterminer si elles doivent faire l’objet d’une déclaration au 1er juillet 2020.

 

Clara DUBRULLE

Vivaldi-Avocats

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