Contestation d’une assemblée générale : entre abstention et opposition…

Delphine VISSOL
Delphine VISSOL

 

Source : CA Colmar, ch. civ. 2, sect. A, 19 janv. 2018, n° 16/02239, JurisData n° 2018-000522

 

Un Syndicat des copropriétaires approuve, en assemblée générale, la réalisation de travaux.

 

Un copropriétaire, dont le mandataire s’était abstenu lors du vote, assigne aux fins de voir annuler cette résolution.

 

Le syndicat oppose l’irrecevabilité de la demande, au motif que seuls les copropriétaires opposants ou défaillants peuvent contester les décisions des assemblées générales, en vertu de l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965.

 

Le Tribunal rejette cette fin de non-recevoir considérant que « l’abstention constituait en l’espèce une réticence évidente au vote et permettait dès lors aux époux H. de conserver leur droit d’agir en annulation ».

 

La Cour d’appel infirme ce jugement par un arrêt motivé, cette motivation méritant d’être reprise au regard de l’exception que la Cour considère pouvoir être envisagée :

 

« Les actions qui ont pour objet de contester les décisions des assemblées générales doivent être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants[1].

 

Pour être recevable en son action, un copropriétaire doit avoir manifesté de façon claire son opposition.

 

Qu’en l’espèce, les époux H. étaient représentés à l’assemblée générale à laquelle a été prise la décision qu’ils contestent.

 

Qu’il ressort du procès-verbal que leur mandataire, avocat, n’a pas voté contre la résolution litigieuse, ni fait part de réserve de ses mandants quant au vote du fait de l’absence de devis joint à l’ordre du jour, mais s’est seulement abstenu.

 

L’abstention n’est pas équivalente à une opposition, à moins qu’elle ait été motivée de façon claire par une volonté de s’opposer au vote ».

 

Aucune réserve du fait de l’absence de devis joint à la convocation ne figure dans le pouvoir du 10 avril 2014, donné par M. H. à Me N’G., et il n’est fait état d’aucune critique, exprimée d’une quelconque façon par les époux H., entre la convocation et l’assemblée générale.

 

C’est par conséquent à tort que le premier juge a écarté l’irrecevabilité soulevée ».

 

Cette question de la qualification de l’abstention lors d’un vote en assemblée générale donne régulièrement lieu à débat (ainsi d’ailleurs également celle de savoir si un copropriétaire qui a voté favorablement à certaines résolutions est recevable à demander la nullité de l’assemblée générale dans son ensemble… étant au besoin ici rappelé que la réponse de la Cour de cassation est négative).

 

En l’espèce, et s’agissant de l’abstentionniste à un vote, l’arrêt de la Cour d’appel semble clair « L’abstention n’est pas équivalente à une opposition ».

 

La Cour ajoute toutefois « à moins qu’elle (savoir l’abstention) ait été motivée de façon claire par une volonté de s’opposer au vote ».

 

Dès lors :

 

si la Cour estime que cette condition n’est pas remplie en l’espèce de sorte que la demande d’annulation du copropriétaire est en toute hypothèse déclarée irrecevable,

 

il n’est toutefois pas certain que dans une espèce où il serait allégué que cette condition est remplie et où un juge du fond considèrerait que la preuve de cette « volonté de s’opposer au vote » malgré une abstention, est rapportée que la Cour de cassation valide cette application ou plutôt, cette interprétation, de l’article 42…

 

Delphine VISSOL.

Vivaldi-Avocats


[1] Article 42 loi du 10 juillet 1965.

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