Contrefaçon de marque : indifférence des conditions d’exploitation

Virginie PERDRIEUX
Virginie PERDRIEUX

 

SOURCE  : Cour de cassation, chambre commerciale, 20 septembre 2016, pourvoi K/14/27159, M20160447, aff. SYBILLE ACCESSOIRES SAS c. CINQ HUITIMES SA

 

L’administration des douanes a alerté la société Cinq Huitièmes, titulaire d’une marque représentant un nœud papillon stylisé pour désigner notamment des vêtements et accessoires, de l’importation en provenance d’Inde par la société Sybille Accessoires d’articles susceptibles de revêtir une marque contrefaisante, représentant également un nœud papillon stylisé.

 

La société Cinq Huitièmes a décidé d’assigner la société Sybille Accessoires en contrefaçon de marque et concurrence déloyale et parasitaire.

 

En appel, la Cour d’appel de Paris a rejeté la demande de la société Cinq Huitièmes en considérant que la société Sybille Accessoires ne contrefaisait pas la marque de la société Cinq Huitièmes au regard des deux différences d’exploitation suivantes :

 

d’une part, les marques détenues par chacune des parties en litige ont été déposées en noir et blanc, tandis que le signe exploité par la société Sybille accessoires est exploitée en métal doré, de sorte qu’il ne s’agirait pas d’une reproduction à l’identique ;

 

d’autre part, il n’existerait aucun risque de confusion dans l’esprit du public entre les produits vendus par les sociétés Cinq Huitièmes et Sybille accessoires, les marques étant apposées sur des produits essentiellement masculins, tandis que le signe litigieux l’est sur des produits davantage féminins et à visée décorative.

 

Saisie d’un pourvoi formé par la société Cinq Huitièmes, la Cour de cassation a cassé et annulé l’arrêt de la Cour d’appel en ses dispositions rejetant sa demande en contrefaçon, à raison de la violation de l’article L.713-3 b) du Code de la propriété intellectuelle, lequel dispose que :

 

«Sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s’il peut en résulter un risque de confusion dans l’esprit du public :

 b) L’imitation d’une marque et l’usage d’une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l’enregistrement ».

 

En effet, la comparaison des marques et le risque de confusion doivent s’apprécier globalement, par référence au contenu des enregistrements des marques, que ce soit pour les produits et services désignés ou la description du signe, sans tenir compte des conditions d’exploitation des marques ou des conditions de commercialisation des produits.

 

En l’espèce, les deux marques en litige ont été déposées sans revendication de couleurs, de sorte qu’en indiquant que la marque de la société Sybille accessoires est exploitée en métal dorée, la Cour d’appel a ajouté des caractéristiques ne figurant pas dans l’enregistrement de ces marques. De même, il importe peu que les sociétés Cinq Huitièmes et Sybille Accessoires exploitent effectivement leurs marques sur des produits sensiblement différents, dès lors que les produits visés dans leurs dépôts sont identiques ou similaires.

 

Une telle jurisprudence n’est pas nouvelle, mais elle n’est pas toujours suivie par les juges du fond, lesquels sont souvent tentés de prendre en considération l’activité commerciale effective des parties pour l’analyse des conditions de la contrefaçon.

 

Virginie PERDRIEUX

Vivaldi-Avocats

 

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