Lorsque le bailleur exerce son droit d’option dans le cadre d’une demande de renouvellement de la part du preneur qu’il avait dans un premier temps accepté, ce dernier devient redevable d’une indemnité d’occupation égale à la valeur locative qui se substitue au loyer dû depuis la date d’expiration dudit bail.
Civ. 3ème, 27 févr. 2025, n° 23-18.219
I –
En l’espèce, le preneur sollicitait le renouvellement de son bail commercial auprès du bailleur. Ce dernier acceptait le principe du renouvellement sans toutefois procéder immédiatement à la renégociation du montant du loyer. Une procédure de fixation du loyer était lancée et avait abouti à une décision irrévocable. Le bailleur décidait alors d’exercer son droit d’option en refusant le renouvellement du bail.
La Cour de cassation rappelle que le renouvellement de bail étant devenu sans objet en raison de l’exercice du droit d’option du bailleur, le preneur devient alors débiteur d’une indemnité d’occupation dont le montant doit être fixé depuis rétroactivement la fin du bail expiré.
II –
II – 1 Le principe du droit d’option
L’article L.145-57 du Code de commerce pose le principe du droit d’option en disposant :
« Pendant la durée de l’instance relative à la fixation du prix du bail révisé ou renouvelé, le locataire est tenu de continuer à payer les loyers échus au prix ancien ou, le cas échéant, au prix qui peut, en tout état de cause, être fixé à titre provisionnel par la juridiction saisie, sauf compte à faire entre le bailleur et le preneur, après fixation définitive du prix du loyer.
Dans le délai d’un mois qui suit la signification de la décision définitive, les parties dressent un nouveau bail dans les conditions fixées judiciairement, à moins que le locataire renonce au renouvellement ou que le bailleur refuse celui-ci, à charge de celle des parties qui a manifesté son désaccord de supporter tous les frais. Faute par le bailleur d’avoir envoyé dans ce délai à la signature du preneur le projet de bail conforme à la décision susvisée ou, faute d’accord dans le mois de cet envoi, l’ordonnance ou l’arrêt fixant le prix ou les conditions du nouveau bail vaut bail. »
Le droit d’option est la faculté de changer d’avis, aussi bien pour le preneur que pour le bailleur, après avoir offert ou accepté le principe du renouvellement. Ce droit d’option peut être exercé à tout moment, avant l’introduction d’une instance, en cours de procédure[1] et même postérieurement à une décision définitive fixant le loyer du bail renouvelé, y compris lorsqu’il s’agit d’un arrêt d’appel, comme en l’espèce.
En effet, l’alinéa 2 de l’article susvisé précise que le refus de renouvellement peut être signifié, au plus tard, dans le délai d’un mois qui suit la signification de la décision définitive fixant le loyer.
L’article L.145-59 du même code ajoute :
« La décision du propriétaire de refuser le renouvellement du bail, en application du dernier alinéa de l’article L.145-57, ou de se soustraire au paiement de l’indemnité, dans les conditions prévues au dernier alinéa de l’article L.145-58, est irrévocable. »
L’exercice du droit d’option est donc définitif et il n’est pas possible pour celui qui l’a utilisé de revenir sur sa décision. Dans ces conditions, le renouvellement de bail envisagé est définitivement abandonné, le bailleur devra une indemnité d’éviction et le preneur devra une indemnité d’occupation.
A la différence du droit de repentir, qui est la faculté offerte au bailleur, qui a d’abord refusé le renouvellement du bail commercial avec paiement d’une indemnité d’éviction de revenir sur sa décision en offrant le renouvellement à son locataire, le droit d’option est rétroactif. De ce fait, l’indemnité d’occupation se substitue au loyer et ce, à compter de la date d’expiration du bail.
En effet, du fait de la rétractation de l’offre de renouvellement du bailleur, le renouvellement du bail n’a jamais été conclu. Le bail a donc définitivement pris fin par l’effet de la demande de renouvellement notifiée par le locataire.
II – 2 L’absence de formalise de l’exercice du droit d’option
Concernant la fixation de l’indemnité d’occupation, elle n’est soumise à aucun formalisme et n’est donc pas soumise à une condition de demande préalable pour pouvoir s’appliquer, contrairement à la procédure de fixation du loyer.
Le bailleur doit donc seulement assigner le locataire dans le délai de deux ans à compter de la notification du droit d’option afin d’obtenir la fixation de l’indemnité d’occupation.
II – 3 L’indemnité d’occupation est égale à la valeur locative
A défaut d’accord contraire entre les parties, le montant de l’indemnité d’occupation doit correspondre à la valeur locative des locaux déterminée selon les critères de l’article L.145-33 du Code de commerce qui dispose :
« Le montant des loyers des baux renouvelés ou révisés doit correspondre à la valeur locative.
A défaut d’accord, cette valeur est déterminée d’après :
1 Les caractéristiques du local considéré ;
2 La destination des lieux ;
3 Les obligations respectives des parties ;
4 Les facteurs locaux de commercialité ;
5 Les prix couramment pratiqués dans le voisinage ;
Un décret en Conseil d’Etat précise la consistance de ces éléments. »
Dans une telle hypothèse, le preneur peut donc se retrouver dans une situation particulière où alors qu’il espérait bénéficier d’un renouvellement avec un loyer plafonné, se trouve rétroactivement débiteur d’une indemnité d’occupation pouvant être beaucoup plus élevée.
Néanmoins, bien que la décision commentée ne le précise pas, l’indemnité d’occupation due par le locataire évincé est affectée d’un abattement destiné à compenser la précarité de la situation locative résultant de la décision du bailleur de refuser le renouvellement du bail. Le droit au maintien dans les lieux du locataire est provisoire et peut s’exercer jusqu’à ce que l’indemnité d’éviction soit définitivement fixée et payée, conformément à l’article L.145-28 du Code de commerce.
[1] Civ. 3ème, 2 déc. 1992, n° 90-18.844