La haute juridiction administrative vient juger que l’administration fiscale peut contrôler l’existence et le montant de déficits en report non imputés relatifs à des exercices prescrits en raison de la situation déficitaire de la société contrôlée.
Conseil d’État, 5 juillet 2023, n° 464928
Pour rappel, il est de jurisprudence constante que l’administration a la possibilité de vérifier l’existence et le montant de déficits réalisés au cours d’exercices couverts par la prescription, dès lors que ces déficits ont été imputés sur les bénéfices imposables réalisés au titre d’exercices non prescrits.
Cette jurisprudence a ensuite été reprise au BOFiP, la doctrine administrative (BOI-IS-DEF-10-20, § 260 et s.).
En l’espèce, une société ayant pour activité la fabrication et le négoce de briquets, d’instruments à écrire et d’accessoires a fait l’objet d’un contrôle comptable au titre des exercices clos de 2008 à 2011.
A l’issue de ce contrôle, l’administration fiscale a estimé que les prix auxquels la société vendait ses produits à sa filiale établie à Hong-Kong étaient constitutifs d’un transfert de bénéfices à l’étranger. De ce fait, elle a rectifié les déficits déclarés par la société au titre de ces exercices.
L’administration fiscale a également remis en cause les résultats déficitaires réalisés au titre des exercices antérieurs au 1er exercice non prescrit sur les mêmes motifs.
L’administration fiscale a ainsi remis en cause des déficits au titre des exercices prescrits alors même que ceux-ci n’ont pas fait l’objet d’une imputation sur les bénéfices réalisés au cours d’exercices non prescrits.
Ainsi, la question posée était de savoir si l’administration fiscale est en droit de contrôler les déficits en report non imputés relatifs à des exercices prescrits.
Suite à cette décision, le tribunal administratif a saisi le tribunal administratif. Sa demande a été rejetée, le tribunal considérant que l’administration fiscale pouvait procéder aux rectifications.
La société a ainsi fait appel de cette décision. La Cour administrative d’appel a également débouté la société en retenant que dans l’hypothèse où l’imposition de la société est nulle du fait de sa situation déficitaire, les déficits en report influent nécessairement sur les résultats servant de base à l’imposition dans la mesure où les déficits issus des exercices antérieurs ont pour effet d’augmenter le déficit des exercices non prescrits.
La société a formé un pourvoi en cassation.
Le Conseil d’État confirme la position de la Cour administrative d’appel.
Les juges retiennent que lorsque l’administration fiscale procède au contrôle fiscal d’une entreprise au titre d’un exercice, elle est fondée à exercer son pouvoir de contrôle et de rectification sur l’existence et le montant du déficit reportable, issu d’exercices antérieurs, même prescrits, dont cette entreprise déclare disposer à la clôture de l’exercice vérifié. Il en est de même lorsque ce déficit n’a pas été imputé sur les bénéfices de cet exercice et est seulement susceptible d’affecter le résultat d’exercices ultérieurs par la voie du report déficitaire.
Le Conseil d’État vient ainsi juger que l’administration fiscale est en droit de vérifier l’existence et le montant de déficits réalisés au cours d’exercices prescrits.
Le contribuable peut ainsi seulement contester par voie de réclamation contentieuse la réduction du montant de son déficit reportable par l’administration fiscale.