Précisions sur la nature du recours exercé contre une décision à objet pécuniaire

Eloïse LIENART
Eloïse LIENART

Dans un avis contentieux récent, le Conseil d’Etat explique que la nature d’un recours exercé contre une décision à objet pécuniaire est fonction, hormis les cas où il revêt par nature le caractère d’un recours de plein contentieux, tant des conclusions de la demande soumise à la juridiction que de la nature des moyens présentés à l’appui de ces conclusions.

Source : Conseil d’Etat, Avis n° 471035 du 25 mai 2023

La Cour administrative d’appel de Versailles a saisi le Conseil d’Etat pour avis relativement à un recours d’un agent public à l’encontre d’une décision à objet pécuniaire.

De manière plus précise, la Cour administrative de Versailles devait statuer sur l’appel formé par La Poste contre un jugement du Tribunal administratif de Versailles par lequel il a, d’une part, annulé la décision par laquelle le directeur de la plateforme industrielle courrier de la Poste de Paris-Sud-Wissous a indiqué à une fonctionnaire qu’il allait opérer des retenues sur ses traitements pour absence de service fait à la suite de l’exercice de son droit de retrait et la décision rejetant le recours gracieux formée par la fonctionnaire contre cette décision et, d’autre part, lui a enjoint de lui rembourser les sommes qui avaient été retenues.

La Cour souhaitait connaître l’avis de la Haute juridiction sur la nature du recours de la requérante contre la lettre l’informant de la décision de retenue sur le traitement.

Cette précision est importante car l’étendue des pouvoirs du juge diffère selon la nature du recours.

De manière schématique, dans le cadre d’un recours pour excès de pouvoir, le juge administratif n’a que le pouvoir d’annuler les actes administratifs illégaux ; alors que dans le cadre d’un recours de plein contentieux, le juge administratif peut non seulement annuler, mais aussi réformer la décision administrative, voire prononcer des condamnations pécuniaires.

La Cour administrative d’appel de Versailles s’interrogeait également sur sa faculté de soulever d’office cette question.

Dans son avis, le Conseil d’Etat considère que : « Si le recours dirigé contre un titre de perception relève par nature du plein contentieux, la lettre informant un agent public de ce que des retenues pour absence de service fait vont être effectuées sur son traitement ne peut à cet égard être assimilée à une telle décision lorsqu’elle ne comporte pas l’indication du montant de la créance ou qu’elle émane d’un organisme employeur qui n’est pas doté d’un comptable public. Des conclusions tendant à l’annulation de cette décision et du rejet du recours gracieux formé contre celle-ci doivent être regardées comme présentées en excès de pouvoir. »

Il précise ensuite que le fait que ce recours en annulation soit assorti de conclusions tendant à ce qu’il soit enjoint à l’administration de rembourser la somme prélevée, qui relèvent du plein contentieux, n’a pas pour effet de donner à l’ensemble des conclusions le caractère d’une demande de plein contentieux.

Enfin, la Haute juridiction considère que le moyen tiré de la méconnaissance de son office par le juge administratif est d’ordre public. Cela signifie que le juge administratif a l’obligation d’examiner ce moyen, même s’il n’a pas été invoqué par les parties.

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