SOURCE : Cass. com., 22 octobre 2013, Arrêt n° 1009 F – D (n° 12-24.162)
Plusieurs associés avaient créés une société à responsabilité limitée ayant pour activité l’activité d’un centre de chirurgie réfractive, l’un d’entre eux étant nommé aux fonctions de gérance.
A la suite d’une opération de restructuration, une personne morale a pris le contrôle du capital de la SARL et c’est ainsi que l’Assemblée Générale des associés de la société réunie en Assemblée Générale Ordinaire Annuelle le 20 avril 2005, va rejeter la résolution portant sur l’approbation des comptes et va révoquer le gérant de ses fonctions, lui reprochant de ne pas avoir pris des mesures pour remédier aux écarts entre le nombre de tirs laser enregistrés par les machines et le nombre d’actes facturés, et de ne pas avoir mis en place une procédure de contrôle visant à réduire ces écarts, lui reprochant également, en réalité, d’avoir détourné ces écarts à son propre profit.
Considérant que sa révocation était intervenue sans juste motif et dans des conditions brusques et vexatoires, l’ancien gérant a fait assigner la société et son associé majoritaire en paiement de divers dommages et intérêts.
Dans le même temps, la société demandait reconventionnellement la condamnation de l’ancien gérant au paiement de certaines sommes au titre de son indemnisation.
La Cour d’Appel de LYON, dans un Arrêt du 22 juin 2012, va rejeter les demandes de l’ancien gérant et le condamner à verser à la société une somme de 80 000 € à titre de dommages et intérêts, condamnant toutefois la société à indemniser son ancien gérant d’une somme de 20 000 € en réparation du préjudice subi du fait des circonstances brutales de sa révocation.
Par suite, l’intéressé se pourvoit en Cassation.
A l’appui de son pourvoi, il reproche à l’Arrêt de la Cour d’Appel d’avoir relevé d’office la faute qu’il aurait commise en ne prenant pas des mesures pour remédier aux écarts entre le nombre de tirs laser enregistrés par les machines et le nombre d’actes facturés, et surtout pour permettre une traçabilité des écarts, de n’avoir pas recherché en quoi ces faits étaient constitutifs de fautes de gestion engageant sa responsabilité envers la société.
La Haute Cour, dans l’Arrêt précité du 22 octobre 2013, considère que l’Arrêt de la Cour d’Appel retient au contraire que l’absence de mise en place d’une procédure de prise en charge des patients et de contrôle interne est source d’un risque fiscal et de responsabilité civile, que l’existence d’écarts entre la comptabilité, le compteur interne et le compteur laser concernant le nombre de tirs est de nature à entraîner une suspicion de fraude à défaut de traces permettant de justifier de tels écarts, que ces faits sont imputables à l’ancien gérant auquel il appartenait de prendre toutes les dispositions nécessaires au bon fonctionnement de la société et qu’en s’abstenant de prendre les mesures propres à remédier à ces écarts et en assurer la traçabilité, c’est à bon droit que la Cour d’Appel avait pu considérer que l’ancien gérant avait commis des fautes de gestion engageant sa responsabilité.
A l’appui de son pourvoi, l’ancien gérant reproche également à la Cour d’Appel de condamner la société à l’indemniser pour le caractère brutal de la révocation intervenue, alors que celle-ci aurait dû être subordonnée à l’existence de justes motifs dont il aurait dû avoir connaissance avant la décision de l’Assemblée, afin de pouvoir, le cas échéant, les réfuter dans l’exercice des droits de la défense.
Là encore, la Cour de Cassation va réfuter cet argument, relevant que l’Arrêt de la Cour d’Appel retient que les questions inscrites à l’ordre du jour de l’Assemblée des associés du 20 avril 2005 étaient susceptibles de déboucher sur la question de la révocation du gérant puisqu’il s’agissait de l’Assemblée Générale Ordinaire annuelle statuant sur les comptes de l’exercice écoulé et que cette assemblée avait donc pu valablement délibérer sur la révocation, celle-ci ayant été décidée sans que l’intéressé ait été préalablement inviter à s’expliquer sur les faits qui lui étaient reprochés, revêtant ici un caractère brutal, circonstance pouvant à elle seule justifier des dommages et intérêts en raison du préjudice subi.
Par suite, la Cour de Cassation rejette le pourvoi de l’ancien gérant.
Christine MARTIN
Associée
Vivaldi-Avocats