SOURCE : Arrêt de la Chambre sociale de la Cour de cassation du 22 septembre 2021, n°18-22.204, FP-B
Compte tenu de l’attitude du salarié, l’employeur a été contraint de lui adresser deux lettres de cadrage (le 24 février et le 4 mars 2015).
Nonobstant la réception de ces lettres, le salarié n’a pas entendu modifier son comportement, de sorte qu’il a été convoqué à un entretien préalable en vue d’une sanction disciplinaire.
Au cours de la procédure, l’employeur a eu connaissance de nouveaux éléments qui l’obligeront à convoquer le salarié à un second entretien, avant de la licencier pour motif personnel.
L’employeur constatant des manquements du salarié (propos dénigrants et excessifs traduisant une volonté de nuire à l’association) a notifié au salarié la fin de son préavis pour faute grave.
Le salarié entendait contester son licenciement pour motif personnel, ainsi que l’interruption de son préavis.
La relation de travail était soumise à la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées, laquelle prévoyait expressément que sauf faute grave un salarié ne peut être licencié, s’il n’a pas été sanctionné au moins à deux reprises.
Les termes de la convention collective fixent expressément les mesures disciplinaires applicables, à savoir : l’observation, l’avertissement, la mise à pied avec ou sans salaire pour un maximum de trois jours et le licenciement.
Le salarié faisait valoir que lorsqu’une sanction est susceptible d’avoir une influence sur le maintien du salarié dans l’entreprise, elle doit être précédée d’un entretien préalable. Par conséquent, les observations qui lui ont été adressées sans entretien préalable ne peuvent constituer des sanctions disciplinaires au sens de la convention collective, de sorte que son licenciement est vicié.
La Cour d’appel n’adopte pas l’interprétation des règles conventionnelles par le salarié, considérant que, les lettres d’observations adressées au salarié constituaient des sanctions régulières ne nécessitant pas d’entretien préalable.
La Cour de cassation rappelle au visa de l’article L. 1332-2 du Code du travail que l’employeur qui envisage de prendre une sanction, doit convoquer le salarié en lui précisant l’objet de la convocation.
Cette obligation de tenir un entretien préalable n’est pas nécessaire si la sanction envisagée est un avertissement ou une sanction de même nature n’ayant pas d’incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l’entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié.
Dès lors, la convention collective qui subordonne l’ouverture d’une procédure de licenciement à l’existence d’au moins deux sanctions, institue une garantie de fond, rendant obligatoire la tenue d’un entretien préalable avant de notifier toute sanction disciplinaire.
Cette largesse d’interprétation de la Cour de cassation pourrait conduire à appliquer l’entretien préalable avant chaque recadrage, avertissement ou blâme, puisque l’employeur peut à l’appui d’un licenciement et en raison de faits nouveaux faire référence à ces sanctions pour justifier la rupture du contrat de travail.
Ainsi, en dehors du contexte de la convention collective précitée et dans la mesure où tout avertissement peut avoir une incidence immédiate ou non, sur la présence dans l’entreprise du salarié, il pourrait être exigé à peine d’irrégularité de la sanction que l’employeur procède à la convocation du salarié à un entretien préalable.