Période suspecte : Nullité de l’hypothèque et nullité du paiement.

Jacques-Eric MARTINOT
Jacques-Eric MARTINOT - Avocat

Source : Cass.Com., 10 juillet 2019, n° 18-17820, n°684 P + B

 

Détenant une créance d’honoraires, un créancier prend une hypothèque sur un bine le 25 juin 2008.

 

L’immeuble est par la suite vendu et le Notaire de verser au créancier le montant de sa créance le 9 mars 2009.

 

Le 2 novembre 2009, le débiteur sera mis en liquidation judiciaire, le jugement d’ouverture arrêtant la date de cessation des paiements au 3 mai 2008.

 

Au regard de la date fixée, le liquidateur va solliciter l’annulation de l’hypothèque et du paiement sur le fondement de l’article L632-1 du Code de commerce qui précise :

 

« I. ― Sont nuls, lorsqu’ils sont intervenus depuis la date de cessation des paiements, les actes suivants :

 

1° Tous les actes à titre gratuit translatifs de propriété mobilière ou immobilière ;

 

2° Tout contrat commutatif dans lequel les obligations du débiteur excèdent notablement celles de l’autre partie ;

 

3° Tout paiement, quel qu’en ait été le mode, pour dettes non échues au jour du paiement ;

 

4° Tout paiement pour dettes échues, fait autrement qu’en espèces, effets de commerce, virements, bordereaux de cession visés par la loi n° 81-1 du 2 janvier 1981 facilitant le crédit aux s ou tout autre mode de paiement communément admis dans les relations d’affaires ;

 

5° Tout dépôt et toute consignation de sommes effectués en application de l’article 2075-1 du code civil (1), à défaut d’une décision de justice ayant acquis force de chose jugée ;

 

6° Toute hypothèque conventionnelle, toute hypothèque judiciaire ainsi que l’hypothèque légale des époux et tout droit de nantissement ou de gage constitués sur les biens du débiteur pour dettes antérieurement contractées ;

 

7° Toute mesure conservatoire, à moins que l’inscription ou l’acte de saisie ne soit antérieur à la date de cessation de paiement ;

 

8° Toute autorisation et levée d’options définies aux articles L. 225-177  et suivants du présent code ;

 

9° Tout transfert de biens ou de droits dans un patrimoine fiduciaire, à moins que ce transfert ne soit intervenu à titre de garantie d’une dette concomitamment contractée ;

 

10° Tout avenant à un contrat de fiducie affectant des droits ou biens déjà transférés dans un patrimoine fiduciaire à la garantie de dettes contractées antérieurement à cet avenant ;

 

11° Lorsque le débiteur est un entrepreneur individuel à responsabilité limitée, toute affectation ou modification dans l’affectation d’un bien, sous réserve du versement des revenus mentionnés à l’article L. 526-18, dont il est résulté un appauvrissement du patrimoine visé par la procédure au bénéfice d’un autre patrimoine de cet entrepreneur ;

 

12° La déclaration d’insaisissabilité faite par le débiteur en application de l’article L. 526-1.

 

II. ― Le tribunal peut, en outre, annuler les actes à titre gratuit visés au 1° du I et la déclaration visée au 12° faits dans les six mois précédant la date de cessation des paiements. »

 

Les juges du fond s’opposeront à la demande en précisant que le texte précité n’est applicable qu’aux dettes antérieurement consenties et non le paiement de dettes échues.

 

La Cour de cassation cassera cet arrêt et précisera :

 

« Qu’en statuant ainsi, alors qu’est nul de droit le paiement reçu par préférence sur le prix de l’immeuble grevé en vertu d’une hypothèque elle-même nulle de droit pour avoir été consentie au cours de la période suspecte pour dettes antérieurement contractées, la cour d’appel a violé les textes susvisés ; »

 

La Cour fait une application stricte du texte et précise que l’hypothèque est nulle car prise en au cours de la période suspecte provoquant la nullité du paiement effectué en vertu de la vente de l’immeuble qu’elle grevait.

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