Vente et fondement de l’action en justice

Kathia BEULQUE
Kathia BEULQUE - Avocat associée

Source : Cass.3ème Civ., 20 mars 2019, n°18-12.919

 

C’est ce que précise la Troisième Chambre Civile de la Cour de Cassation, dans cette décision, inédite, comme suit :

 

« …

 

Sur le moyen unique :

 

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Toulouse, 28 février 2018), que M. S…, qui avait acquis un véhicule automobile auprès de la société DBF Toulouse automobiles (DBF), a assigné son vendeur en résolution de la vente pour manquement à l’obligation de délivrance et en réparation de son préjudice de jouissance et des frais exposés ;

 

Attendu que M. S… fait grief à l’arrêt de rejeter ses demandes, alors, selon le moyen :

 

1°/ qu’un véhicule qui présente des anomalies de carrossage par rapport aux valeurs fixées par son constructeur est affecté de non-conformités ; qu’en ayant jugé que les défauts affectant le véhicule Polo acquis par M. S… s’analysaient exclusivement en des vices cachés, après avoir pourtant relevé que, selon les conclusions de l’expert amiable ayant contradictoirement expertisé le véhicule, « le bilan du contrôle de géométrie montre des anomalies sur le carrossage du train avant en dehors des valeurs du constructeur », « le parallélisme arrière est hors cote constructeur, le carrossage AR est limite tolérance constructeur », ce dont il résultait que le véhicule litigieux était affecté de non-conformités par rapport à ses normes de construction, la cour d’appel a omis de tirer les conséquences légales qui se déduisaient de ses propres constatations au regard de l’article 1604 du code civil ;

 

2°/ que les juges doivent eux-mêmes qualifier un désordre en vice caché ou non-conformité, sans pouvoir s’arrêter à la qualification qu’un expert amiable a cru pouvoir leur donner ; qu’en ayant qualifié les désordres affectant le véhicule de M. S… de vices cachés, en s’arrêtant à la qualification que l’expert amiable, M. M…, leur avait donné, la cour d’appel a violé les articles 1604 du code civil et 12 du code de procédure civile ;

 

3°/ que les juges du fond ne peuvent dénaturer par omission les conclusions des parties ; qu’en s’étant fondée sur des énonciations tronquées des conclusions de M. S… qui, au-delà du tirage à droite du véhicule et de l’usure prématurée des pneumatiques, avait fait valoir que sa voiture était affectée de non-conformités aux valeurs du constructeur, la cour d’appel a violé l’article 4 du code de procédure civile et méconnu l’obligation faite aux juges de ne pas dénaturer l’écrit qui lui est soumis ;

 

4°/ que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu’en s’étant arrêtée aux griefs de M. S… ayant dénoncé le « tirage à droite » de son véhicule et l’usure exceptionnelle des pneus de celui-ci, sans répondre aux conclusions de M. S…, ayant fait valoir que ces désordres procédaient de la non-conformité du véhicule aux valeurs de carrosserie du constructeur, la cour d’appel a omis de répondre à des conclusions opérantes de M. S…, en méconnaissance des prescriptions de l’article 455 du code de procédure civile ;

 

5°/ que le rejet d’une demande de résolution de la vente d’un véhicule pour méconnaissance de l’obligation de délivrance du vendeur n’exclut pas que celui-ci ait engagé sa responsabilité à l’égard de l’acquéreur ; qu’en ayant rejeté la demande d’indemnisation de M. S… dirigée contre la société DBF qui, en raison de son impéritie, lui avait causé un préjudice, la cour d’appel a violé les articles 1604 et 1147 ancien du code civil ;

 

Mais attendu que la demande de M. S… étant expressément fondée sur l’obligation de délivrance conforme édictée aux articles 1603 et 1604 du code civil, la cour d’appel n’était pas tenue de modifier le fondement juridique de la demande en examinant la prétention sous l’angle de la garantie des vices cachés que l’intéressé avait exclue ;

 

Et attendu qu’ ayant souverainement estimé que les désordres affectant le véhicule le rendaient impropre à sa destination, la cour d’appel a exactement décidé, par une décision motivée et sans dénaturation, que les défauts relevaient de la garantie des vices cachés et non d’un manquement à l’obligation de délivrance ;

 

D’où il suit que le moyen, qui est inopérant en sa cinquième branche dès lors que la demande indemnitaire de M. S… était fondée sur l’article 1382, devenu 1240, du code civil et non sur ses articles 1604 et 1147, celui-ci dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016, n’est pas fondé ;

 

PAR CES MOTIFS :

 

REJETTE le pourvoi ;… »

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