Remise en état du site d’une installation classée et responsabilité du propriétaire du terrain

Sylvain VERBRUGGHE
Sylvain VERBRUGGHE

 

SOURCE : CE, 6ème et 5ème Chambres réunies, 29 juin 2018, n°400677, Mentionné aux tables du recueil Lebon

 

La mise à l’arrêt définitif d’une installation classée pour la protection de l’environnement oblige le dernier exploitant connu ou son ayant droit à remettre le site dans un état tel qu’il ne puisse porter atteinte à l’environnement. Cette obligation, mentionnée à l’article R512-39-1 du Code de l’environnement, ne vise en principe pas le bailleur ou propriétaire non exploitant de l’ensemble immobilier, qui n’est pas, en cette seule qualité, débiteur de cette obligation, comme le rappelle le Conseil d’Etat dans l’affaire commentée.

 

Le Conseil d’Etat précise toutefois, dans le prolongement d’une précédente jurisprudence[1] que les obligations du producteur de déchet peuvent incomber à l’acquéreur lorsqu’il s’approprie, d’une manière ou d’une autre, les déchets. Sa responsabilité pourrait ainsi être retenue en qualité d’ayant droit du dernier exploitant du site, lorsque, par exemple, l’acte d’acquisition du terrain a eu pour effet, « eu égard à son objet et à sa portée, en lui transférant l’ensemble des biens et droits se rapportant à l’exploitation concernée, de le substituer, même sans autorisation préfectorale, à l’exploitant ». La responsabilité du propriétaire du terrain d’assiette ne serait ainsi pas nécessairement réduite à la détention de déchets au sens de l’article L541-2 du Code de l’environnement, c’est-à-dire « s’il a fait preuve de négligence à l’égard d’abandons sur son terrain » [2].

 

En l’espèce, après mise à l’arrêt d’une installation classée, le terrain d’assiette de l’activité est vendu à une SCI, filiale d’un groupe racheté par une société, que le Préfet met en demeure, par arrêté, de poursuivre la remise en état du site.

 

L’arrêté est annulé par les juridictions du fond, dont les décisions sont confirmées par le Conseil d’Etat. En effet, selon la Haute juridiction, aucun acte ne justifie que la société se serait substituée à l’ancien exploitant.

 

Le ministre de l’Environnement estimait également que la société avait nécessairement hérité des déchets de l’installation dès lors que le dernier exploitant n’avait aucun ayant droit. Le Conseil d’Etat rejette le moyen : les juges du fond n’ont pas à rechercher l’identité de l’ayant cause du dernier exploitant, mais doivent simplement déterminer si la société était le dernier exploitant ou son ayant droit ou si elle avait seulement acquis le terrain d’assiette.

 

Aucun lien ne rattachant l’exploitant à la société, qui ne semblait pas avoir repris, directement ou indirectement, les actifs de l’exploitant de l’ICPE, le propriétaire du terrain d’assiette est dégagé de toute responsabilité.

 

Sylvain VERBRUGGHE

Vivaldi-Avocats



[1] Conseil d’État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 26/07/2011, n°328651

[2] Sur le sujet, Cf notre article du 18 novembre 2014, « Responsabilité du propriétaire du terrain en tant que détenteur de déchet » 

 

 

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