Source : Cour administrative d’appel de Paris, 2ème chambre, 13 avril 2022, 21PA05941
Deux dispositifs distincts s’appliquent aux sommes versées au titre de la prestation compensatoire, savoir :
Lorsque la prestation est servie sous la forme d’un capital versé dans les 12 mois à compter du jugement de divorce passé en force de chose jugée ou de la convention de divorce ayant acquis une force exécutoire, le débiteur, soit le redevable de la prestation compensatoire, bénéficie d’une réduction d’impôt de 25 % du montant des versements. Toutefois, la base pris en compte pour le calcul de la réduction d’impôt ne peut excéder 30 500 €. Par ailleurs, le bénéficiaire de la prestation compensatoire n’est pas imposé sur ces versements[1].
Pour les rentes viagères ou temporaires ou lorsque la prestation est versée en capital sur une période de plus de 12 mois, les versements sont déductibles du revenu imposable du débiteur. De ce fait, le bénéficiaire doit soumettre à imposition ces versements selon le régime des pensions[2].
Un autre dispositif est appliqué aux pensions alimentaires versées aux ex-époux ou pour l’entretien des enfants. Celles-ci peuvent être déductibles du revenu brut global du débiteur de la pension. La déduction est accordée sous réserve des conditions suivantes :
les contribuables doivent être séparés de corps ou divorcés, ou en instance de séparation ou de divorce, et faire l’objet d’une imposition séparée ;
les pensions doivent être versées en vertu d’une décision de justice ou d’une convention de divorce par consentement mutuel et doivent avoir un caractère alimentaire (nourriture, logement…).
Par ailleurs, si la pension est versée pour l’entretien des enfants, le parent ne pourra déduire cette pension que si ses enfants ne sont pas rattachés à son foyer fiscal et pris en compte dans le calcul de son quotient familial.
Le montant de la pension admis en déduction correspond au montant, éventuellement revalorisé par le jugement.
En l’espèce, M. X a été condamné, par jugement, à verser à son ex-épouse une prestation compensatoire sous la forme d’un capital payable par versements mensuels pendant 8 ans.
A l’issu d’un contrôle, l’administration fiscale a remis en cause la déductibilité des sommes que M. X déclarait avoir versées au titre de la prestation compensatoire due à son ex-épouse.
En effet, l’administration fiscale relève que M.X a bénéficié du dispositif de réduction d’impôt au titre des années 2010 et 2011 puis porté en déduction au titre des années 2013 à 2015, diverses sommes correspondant, d’après ses déclarations de revenus, à la prestation compensatoire versée à son ex-épouse.
L’administration a donc refusé cette déduction au titre des années 2013 à 2015 estimant qu’il avait déjà bénéficié de réduction d’impôt au titre des années 2010 et 2011 et que les sommes litigieuses ne pouvaient être regardées comme se rapportant à la prestation compensatoire.
Elle a estimé que M.A s’était acquitté de son obligation et qu’il s’était ainsi libéré de manière anticipée du paiement du capital dans un délai inférieur à 12 mois à compter du jugement.
Le tribunal administratif rejetant sa demande tendant à être déchargé des suppléments d’impôt sur le revenu qui lui ont été assignés, M.X a saisi la Cour administrative d’appel.
La Cour juge que la prestation compensatoire devait être déductible des revenus imposables de M.X au vu des modalités de versement de la prestation compensatoire (versements pendant 8 ans).
Toutefois, M.X ayant bénéficié de la réduction d’impôt sur la base de ses déclarations souscrites, ce qu’il admet expressément, la Cour juge qu’il était présumé s’être déjà libéré de la prestation compensatoire et que les versements déclarés par lui au titre des années 2013 à 2015 ne pouvaient ainsi pas s’y rapporter.
M.X a indiqué que les sommes déduites résultaient d’un accord avec son ex-épouse quant à la prise en charge des dépenses de loyers et d’entretien de leurs enfants.
Cependant, la Cour retient que M. X n’établit pas que ces versements, qui ne sont pas justifiés, se rattachaient à la prestation compensatoire et non à la pension alimentaire que le juge aux affaires familiales avait, par ailleurs, mis à sa charge.
Ainsi, cet arrêt permet de rappeler les distinctions de régime entre la prestation compensatoire, pour laquelle 2 dispositifs distincts s’appliquent, et la pension alimentaire.
Par ailleurs, afin d’éviter toute remise en cause, il est également plus judicieux de respecter les modalités de versement mises en place par le juge, ce qui n’était pas le cas en l’espèce. En effet, les prestations compensatoires ou les pensions alimentaires versées à un ex-époux ou pour l’entretien des enfants ne peuvent être admises en déduction que sur preuve de décision de justice (ou d’une convention de divorce en cas de consentement mutuel).
[1] CGI, art. 199 octodecies
[2] CGI, art. 80 quater et art. 156, II – 2 °