Manquement d’un représentant du personnel à son obligation de discrétion

Patricia VIANE CAUVAIN
Patricia VIANE CAUVAIN - Avocat

Source : Cour de Cassation Soc 15/6/2022 n° 21-10366

En l’espèce, une salariée travaillant dans une banque, titulaire de plusieurs mandats de représentants du personnel dont celui de membre du Comité d’Entreprise Européen, a reçu un avertissement pour non-respect des règles de sécurité et de confidentialité à l’occasion d’une réunion du CE européen.

La salariée avait établi une liste de questions qu’elle comptait soumettre au CE Européen sur l’ordinateur portable du CE et non sur son BlackBerry sécurisé, transféré ce document sur une clé USB du Comité et l’a imprimé sur l’imprimante de l’hôtel où elle résidait.

Le document faisait référence à la situation financière d’une des agences de la banque en Grèce et  au projet d’installation d’une succursale notamment dans ce pays ; les informations devaient rester strictement confidentielles.

La salariée reçoit un avertissement pour manquement à l’obligation de discrétion dont elle demande l’annulation et sollicite des dommages et intérêts pour discrimination syndicale.

Elle est déboutée de même que le Syndicat qui la soutient : La Cour d’Appel considère que les informations relatives à la situation financière d’une des agences en Grèce, aux stratégies invoquées dans le cadre du projet de création d’une succursale sont de nature confidentielle au regard des intérêts légitimes de l’entreprise.

Les premiers juges ont relevé que lors de la réunion du Comité Central d’entreprise à laquelle la salariée avait participé, il a été précisé que le « sujet est encore sous embargo » et les informations doivent donc rester strictement confidentielles »

La salariée avance dans le cadre de son pourvoi qu’elle ne pouvait être sanctionnée qu’en raison de faits constituant un manquement à ses obligations professionnelles envers l’employeur et non pour des faits concernant l’exercice de son mandat, sauf à prouver un abus ou un manquement à son obligation de discrétion.

Elle ajoute qu’aucun abus dans l’exercice de son mandat pas plus qu’un manquement à son obligation de discrétion en l’absence de divulgation des questions litigieuses à un tiers non autorisé n’a été relevé

L’information pour être couverte par l’obligation de discrétion doit être non seulement de nature confidentielle mais déclarée comme telle par l’employeur.

La Cour de Cassation approuve la décision de la Cour d’Appel :

Elle définit la notion d’informations présentant un caractère confidentiel au sens de l’article L 2342-10 du Code du Travail.

Celui-ci prévoit en effet que les membres du comité d’entreprise européen institué par accord ainsi que les experts qui les assistent sont tenus :

1° Au secret professionnel pour toutes les questions relatives aux procédés de fabrication ;

2° A une obligation de discrétion à l’égard des informations présentant un caractère confidentiel et données comme telles par l’employeur.

Pour la Cour de Cassation revêtent un tel caractère, les informations qui sont de nature confidentielle au regard des intérêts légitimes de l’entreprise.

Ici, c’est le risque de divulgation des informations confidentielles du fait du non-respect des règles de sécurité qui caractérise le manquement du salarié à son obligation de discrétion.

La présentation de l’information en tant que confidentielle peut être orale ou écrite

En l’occurrence, les informations avaient été présentées comme confidentielles par l’employeur pendant la réunion avec les représentants du personnel et retranscrites dans le PV.

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