La Chambre sociale de la Cour de cassation énonce dans son arrêt du 8 octobre 2025 que le télétravailleur a les mêmes droits que le salarié qui exécute son travail dans les locaux de l’entreprise. A ce titre, l’employeur ne peut refuser l’octroi des titres-restaurant à des salariés au seul motif qu’ils exercent leur activité en télétravail.
Le titre-restaurant est un titre remis par l’employeur aux salariés au titre duquel il prend en charge une partie du prix du repas. L’employeur en détermine librement le montant. A noter que la détermination du prix du titre-restaurant est en réalité influencé par les limites légales imposées à la contribution financière des employeurs.
La Cour de cassation a toujours considéré que les titres-restaurants constituaient un avantage en nature devant entrer dans la rémunération du salarié de sorte qu’elle les soumet au principe d’égalité de traitement[1].
Auparavant, la Haute juridiction a exclu les télétravailleurs du bénéfice des titres-restaurant puisqu’elle considérait que l’objet de cet avantage en nature consistait à suppléer la carence du salarié présent sur le site de prendre son repas à son domicile et faire face au coût lié à sa restauration[2]. Depuis, sa position a évolué puisque désormais si le titre-restaurant constitue un moyen pour les salariés de se restaurer lorsque son horaire de travail journalier inclut un repas, alors la distinction n’est plus pertinente. Ainsi, « la seule condition à l’obtention du titre-restaurant est que le repas du salarié soit compris dans son horaire journalier[3]. »
Toutefois, la jurisprudence demeure divisée puisque le Tribunal Judiciaire de Nanterre avait considéré qu’à défaut d’un surcoût lié à leur restauration hors de leur domicile, les télétravailleurs ne sont pas dans une situation comparable à celle des salariés travaillant sur site sans restaurant d’entreprise et n’ont pas droit, comme ces derniers, à des titres-restaurants[4]. A l’inverse, le TJ de Paris avait, au contraire, considéré qu’il n’y avait pas lieu de distinguer la situation des télétravailleurs et celles des salariés travaillant dans les locaux de l’entreprise, de sorte que le refus de leurs attribuer des titres-restaurant ne repose sur aucune raison objective en rapport avec l’objet de ces titres[5]. Ces différentes approches se fondent sur la finalité du titre-restaurant mais aussi sur leur qualification juridique selon qu’il s’agisse d’un avantage en nature ou de frais professionnels[6].
Il est important de rappeler que les télétravailleurs sont des salariés ordinaires. A ce titre, ils ne bénéficient d’aucun statut spécifique. Cela résulte des dispositions du code du travail qui disposent que le télétravailleur a les mêmes droits que le salarié qui exécute son travail dans les locaux de l’entreprise[7]. De cette façon, le principe de l’égalité de traitement est respecté.
Dans l’arrêt du 8 octobre 2025, un directeur commercial a saisi la juridiction prud’homale afin d’obtenir le paiement d’une somme correspondant à la contribution patronale sur les titres-restaurants sur une période déterminée durant laquelle il a exercé son activité en télétravail. Cette période constituait, pour une grande partie, celle de la crise sanitaire du Covid-19. La société réservait cet avantage uniquement aux salariés présents sur le site de l’entreprise.
La Haute juridiction énonce qu’au visa de l’article L. 1222-9, III, alinéa 1er, du code du travail, le télétravailleur a les mêmes droits que le salarié qui exécute son travail dans les locaux de l’entreprise. Qu’aux termes de l’article R. 3262-7 du même code, un même salarié ne peut recevoir qu’un titre-restaurant par repas compris dans son horaire de travail journalier. Il en résulte que la seule condition à l’obtention du titre-restaurant est que le repas du salarié soit compris dans son horaire journalier. Par conséquent, l’employeur ne pouvait refuser l’octroi de cet avantage à des salariés au seul motif qu’ils exerçaient leur activité en télétravail.
Le critère déterminant pour bénéficier du titre-restaurant est donc l’existence d’un repas compris dans son horaire journalier et non le lieu où l’activité est exercée.
En définitive, la Cour de cassation consacre une égalité de traitement entre les télétravailleurs et les salariés qui exécutent leur travail dans les locaux de l’entreprise.
Sources : Cass. soc., 8 oct. 2025, n° 24-12.373, FS-B
[1] Cass. soc., 29 nov. 2006, n° 05-42.853 . – Cass. soc., 9 avr. 2008, n° 06-45.286 ; Cass. soc., 1er mars 2017, n° 15-18.333
[2] Cass. soc., 22 janv. 1992, n° 88-40.938
[3] Cass. soc., 13 avr. 2023, n° 21-11.322
[4] TJ Nanterre, 10 mars 2021, n° 20/09616
[5] TJ Paris, 30 mars 2021, n° 20/09805
[6] Pour aller plus loin : La Semaine Juridique Entreprise et Affaires n° 27, 08 juillet 2021, 1354, G. Vachet
[7] C. trav., art. L. 1222-9 III